Handicap en Suisse: souvent difficile, parfois comique

(swissinfo.ch)

Avoir accès au monde du travail, à l’éducation ou aux transports publics peut se révéler compliqué pour les personnes en situation de handicap vivant en Suisse. Le témoignage du comédien Eddie, qui a une paralysie cérébrale.

(Vidéo en allemand sous-titrée en français)

 

Vivre en chaise roulante n’est pas si terrible, explique le Zurichois Eddie, né avec une paralysie cérébrale. Quand il sort le soir et tente de se frayer un chemin dans une boîte de nuit bondée, les gens sautent rapidement de côté en s’excusant pour lui laisser la place. Tel un «Moïse des discothèques» qui ouvre la mer des danseurs, disent ses amis.

Mais dans d’autres domaines, les obstacles physiques et sociaux à une vie normale sont nombreux. Environ 1,8 million de personnes sont en situation de handicap en Suisse, et bien qu’elles soient traitées de façon égalitaire aux yeux de la loi, la réalité sur le terrain est tout autre.

L’accès à certains espaces publics ou privés est parfois difficile voire impossible. Le regard des autres peut aussi être biaisé, confie Eddie. Des individus le voient comme un être gênant ou font preuve d’une condescendance à la limite du comique. Le Zurichois en profite pour exploiter ce potentiel dans ses spectacles humoristiques.

Les parents d’enfants handicapés paient l’école trop cher

(rts.ch)

Les contributions financières demandées aux parents d’enfants handicapés qui se rendent dans des écoles spécialisées sont trop élevées, estime Monsieur Prix. Elles peuvent atteindre 137 fr. par jour selon les cantons, alors qu’elles ne devraient pas dépasser 16 fr.

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Pour le Surveillant des prix Stefan Meierhans, la gratuité de l’enseignement de base vaut aussi pour les écoles spécialisées qui accueillent des enfants handicapés. Les parents ne devraient donc payer que ce qu’ils économisent en raison de l’absence de leur enfant à la maison, soit entre 5.50 francs et 16 francs au maximum en fonction de l’âge de l’enfant, ce qui correspond au prix des repas.

5 cantons romands sur 7 réclament trop d’argent

Or, une étude de la Surveillance des prix parue mardi montre que 17 cantons sur 26 demandent une contribution plus élevée aux parents. En Suisse romande, Genève (30 fr.), Berne (30 fr. aussi), Neuchâtel (22 fr.), Jura (20 fr.) et Fribourg (17,50 fr.) dépassent la limite. Seuls neuf cantons demandent une contribution inférieure à ces montants, parmi lesquels Vaud et le Valais (10 fr. chacun).

Des différences considérables ont été constatées selon les cantons. Les contributions demandées aux parents sont particulièrement élevées lorsque leur montant dépend du revenu des parents, comme c’est le cas dans trois cantons ou demi-cantons: Bâle-Ville, Appenzell Rhodes-Intérieures et Bâle-Campagne. Ce dernier est le canton le plus cher, avec un maximum de 137,50 fr. par jour demandés aux personnes dont le revenu est important, soit près de neuf fois le maximum qui découle du respect du principe de la gratuité de l’enseignement.

Le montant des frais journaliers demandés dans 23 cantons:

 

Note: Les cantons dans lesquels la contribution dépend du revenu ne sont pas inclus. [Source: Surveillant des prix]

Comme pour les camps et sorties scolaires

Pour justifier ces montants, les cantons qui demandent une contribution élevée expliquent qu’elle sert à couvrir les coûts journaliers de l’internat, c’est-à-dire les repas, mais aussi les frais d’hébergement et de prise en charge des enfants handicapés qui doivent rester dans l’établissement spécialisé durant la semaine pour suivre leur formation.

Cependant, deux arrêts du Tribunal fédéral en relation avec la gratuité de l’enseignement lors des camps et sorties scolaires ont jugé que ni les frais de prise en charge, ni les frais d’hébergements ne peuvent être facturés aux parents, car ils font partie intégrante de la formation de l’enfant. De plus, repas exceptés, les parents n’économisent pas d’argent lorsque l’enfant ne dort pas à la maison, puisqu’ils doivent de toute manière prévoir un hébergement pour lui lorsqu’il rentre.


Lire à ce sujet: Le Valais met en œuvre la gratuité de l’école exigée par un arrêt du TF


Pour le Surveillant des prix, ces arrêts du TF s’appliquent par analogie à la prise en charge d’enfants ou adolescents handicapés qui, pour pouvoir bénéficier de la formation scolaire initiale, doivent être hébergés dans une école spécialisée en raison de leur handicap.

Autrement dit, la contribution demandée pour les enfants placés dans des écoles spécialisées ne doit pas être calculée sur la base des coûts qui incombent à l’école en question, mais uniquement sur la base des coûts réellement économisés par les parents du fait de l’absence de l’enfant. Demander une contribution pour l’hébergement et la prise en charge est donc contraire à la gratuité de l’enseignement garantie par la Constitution.

(Vincent Cherpillod avec ats)

Vaud se dirige vers une école inclusive

(Le Temps.ch)

Le Département vaudois de la formation a conçu le «Concept 360°» visant à mieux intégrer dans les classes les élèves souffrant d’une déficience intellectuelle. Le projet devrait être mis en œuvre dès 2022.

Rentrée
L’école de demain (4/5)Omniprésence du numérique,augmentation de la sédentarité,volonté de mieux intégrer les élèves à besoins spécifiques: ces évolutions métamorphosent l’enseignement. A l’heure de la rentrée, «Le Temps» se penche cette semaine sur plusieurs innovations pédagogiques. Ayant fait leurs preuves dans certains établissements, elles pourraient être étendues à d’autres et dessiner les contours de l’école de demain.

MARION MARCHETTI
Comment intégrer les élèves avec une déficience intellectuelle dans les classes romandes,tout en respectant le rythme de chacun? Au tour du canton de Vaud d’étudier la question: s’il se montre inclusif envers les élèves avec une déficience intellectuelle,c’est souvent uniquement dans les premières années du primaire. Il cherche désormais à s’orienter vers plus d’intégration à travers le «Concept 360°», dont la mise en pratique est prévue d’ici à 2022.

Ce projet vise le développement d’une pédagogie universelle, avec une plus grande collaboration entre les différents corps professionnels impliqués dans l’enseignement. Faciliter l’organisation des dispositifs nécessaires pour les élèves à besoins spécifiques doit leur permettre de suivre leur scolarisation au sein même de l’établissement. Le corps enseignant bénéficiera de soutiens pour optimiser cette intégration.

Des défis motivants

Tous les cantons romands sont confrontés à ces défis d’inclusion.«L’intégration de ces élèves dans les classes ordinaires est déjà ancrée dans les mœurs du corps enseignant valaisan et fribourgeois, deux cantons pionniers en la matière, aux niveaux primaire et secondaire», explique Rachel Sermier-Dessemontet, professeure en pédagogie spécialisée de la Haute Ecole pédagogique(HEP) vaudoise. En 2015, un plan d’action a concrétisé la volonté du canton de Genève d’intégrer les élèves à besoins particuliers. Ce projet ambitieux n’empêche pas la spécialiste de rappeler que, dans ce canton, la grande majorité des enfants avec une déficience intellectuelle continue d’étudier dans des classes ou écoles spécialisées- une situation similaire à celle de Neuchâtel et du Jura.

Au niveau national, le nombre d’enfants scolarisés à part a augmenté jusqu’en 2004, rappelle l’Office fédéral de la statistique(OFS). C’est alors qu’est entrée en vigueur la loi fédérale sur l’élimination des inégalités frappant les personnes handicapées. Celle-ci a exigé des cantons «qu’ils encouragent l’intégration des élèves en situation de handicap dans l’école ordinaire par des formes de scolarisation adéquates, pour autant que cela soit possible et serve le bien de l’enfant», indique Romain Lanners, directeur du Centre suisse de pédagogie spécialisée.Depuis, le nombre d’élèves étudiant dans le spécialisé a diminué de 38%, soit de 50400, en 2004, à31400, en 2016.

En quoi l’intégration des élèves avec une déficience intellectuelle dans des classes ordinaires leur est-elle bénéfique? «On parle ici de déficience légère à moyenne et de personnes ayant de bonnes compétences d’apprentissage,précise Emmanuelle Seingre,vice-présidente d’Insieme, la fédération suisse des associations de parents de personnes mentalement handicapées. En principe,les parents d’un enfant souffrant de polyhandicap ne souhaitent pas l’inclure dans une école non spécialisée.»

L’inclusion dans une classe ordinaire tire ces enfants vers le haut en augmentant les exigences, l’enseignant visant des objectifs plus élevés. Les résultats des élèves ordinaires servent de motivation à l’enfant avec une déficience intellectuelle. Le projet de recherche de Rachel Sermier-Dessemontet indique des progrès significatifs en lecture et en expression écrite.

Cette même étude assure que la présence d’élèves souffrant de déficience intellectuelle n’entrave pas l’apprentissage du reste de la classe, dont les progrès s’avèrent similaires en cas d’inclusion et de non-inclusion. Quant aux coûts de l’enseignement, une analyse de Romain Lanners souligne qu’ils ne sont pas influencés par l’intégration de ces élèves.

Positif pour toute la famille

On peut redouter les moqueries des enfants ordinaires. Une crainte que Philippe Nendaz, responsable de l’enseignement spécialisé de l’État de Vaud, nuance:«Il apparaît tout à fait naturel pour un enfant de 4 à 7 ans d’en côtoyer d’autres dont la singularité nous semblerait à nous adultes comme prégnante. Lors de l’adolescence, les questions des différences, inhérentes à la construction d’une identité propre, constituent également le défi du vivre ensemble qu’il est nécessaire d’aborder avec les enfants.»L’école inclusive facilite l’intégration sociale des élèves avec une déficience intellectuelle:«L’enfant est alors connu dans son quartier. Quand ses frères et sœurs invitent des amis, leurs copains le connaissent et ne sont pas intimidés, c’est un retour positif pour toute la famille», souligne Emmanuelle Seingre.

Ces bénéfices s’obtiennent au prix de nombreux efforts. «L’intégration d’une personne est toujours le résultat d’une longue négociation, explique la vice-présidente d’Insieme. Elle nécessite que les autorités de l’établissement scolaire soient ouvertes et que le corps enseignant soit partant, cela ne va pas de soi.»

Des adaptations sont requises dans l’encadrement scolaire de l’enfant, souvent renforcé par des auxiliaires. L’étude de Rachel Sermier-Dessemontet, qui souligne les bénéfices de l’inclusion scolaire, concerne des enfants encadrés recevant six à neuf périodes de soutien spécialisé supplémentaires par semaine.Elle mentionne que les attitudes du personnel enseignant ordinaire s’avèrent plus positives après avoir expérimenté l’intégration scolaire. «Dans l’idéal,il faudrait moins d’élèves par classe», ajoute Emmanuelle Seingre. Cela faciliterait beaucoup l’inclusion des enfants à besoins particuliers.

A la rentrée, 138 élèves handicapés ou à besoins particuliers bénéficieront d’un soutien de l’office médico-pédagogique dans l’enseignement régulier à Genève

(ats/nxp)

A Genève, 76’893 élèves prendront le chemin de l’école lundi, soit 1’172 de plus qu’à la rentrée 2018. La hausse la plus importante se situe au niveau primaire, avec 863 élèves supplémentaires. Quelque 375 nouveaux enseignants ont été engagés, sur un total de 7’182.

«Contrairement à d’autres cantons, Genève continue à connaître une hausse démographique qui met le système sous tension en matière de personnel, de locaux et de budget», a relevé mardi devant les médias la conseillère d’Etat Anne Emery-Torracinta, en charge de L’instruction publique. Selon elle, les moyens suivent. Le nombre moyen d’élèves par classe et le taux d’encadrement sont stables.

Décrochage scolaire

Dès lundi, l’enseignement obligatoire comptera 49’723 élèves, soit 36’511 au primaire et 13’212 au cycle d’orientation. Quant au secondaire II, il accueillera 25’222 élèves, soit 394 de plus que l’an passé. Cette hausse équivaut au nombre d’élèves inclus dans le dispositif contre le décrochage scolaire intitulé Formation obligatoire jusqu’à 18 ans (FO18), introduit en 2018.

FO18 a proposé une solution à plus de 700 jeunes durant l’année scolaire 2018-2019. Cette rentrée, 489 places sont attribuées, pour atteindre un total de 805 places dans le courant de l’année. L’offre de formation pré-qualifiante est adaptée, tandis que 20 places de stage en entreprises seront créées durant l’automne.

Éducateurs dans les classes

Principale nouveauté de cette rentrée, la grille horaire du cycle d’orientation sera adaptée pour la volée commençant la 9e année afin d’harmoniser, d’ici à 2021, le nombre de périodes par année: 33 périodes en 9e, 32 en 10e et 33 en 11e. Et pour se rapprocher des exigences fédérales en matière d’éducation physique, huit périodes de gym, au lieu de six, seront données sur l’ensemble du cursus.

A la rentrée, 138 élèves handicapés ou à besoins particuliers bénéficieront d’un soutien de l’office médico-pédagogique dans l’enseignement régulier, contre 55 en 2018. Tout en partageant les objectifs de l’école inclusive, la Fédération des enseignants genevois rappelle de son côté qu’elle juge les effectifs par classe trop importants pour accueillir ce type d’élèves.

En plus des enseignants spécialisés, des éducateurs interviendront désormais aussi dans les classes du primaire en appui au maître. «La violence des tout petits est un phénomène de société. Un élève avec des troubles importants suffit à perturber la classe», a commenté la magistrate.

Vis-à-vis des sourds, le cinéma est toujours plus dur de la feuille

(Le Matin)

À Bienne comme partout ailleurs, les versions originales sous-titrées cèdent de plus en plus le pas devant les versions doublées. Les principaux lésés le déplorent.


À Bienne, Madeleine Sigg (à g.) et Béatrice Grimm n’entendent pas King Kong représenté sur le Palais des Congrès..

 

Attablée dans un café biennois, Béatrice Grimm converse par écrit, dans un calepin. Pour elle, le cinéma est un divertissement d’autant plus apprécié que l’accès à la culture n’est pas toujours aisé quand on est sourde. Problème, à Bienne comme partout ailleurs: les versions originales sous-titrées cèdent le pas devant les versions doublées.


Sans sous-titrage, Madeleine Sigg, ne peut pas prendre place parmi les spectateurs d’un film doublé en allemand.

 

L’autre jour à Lyss (BE), Béatrice Grimm s’est carrément fâchée: «Je me suis rendue à un Openair avec une amie et sa cousine du Koweït pour voir le film «Bohemian Rhapsody» sur Freddie Mercury et son groupe Queen. Surprise: La version n’était pas l’originale en anglais, mais un doublage synchronisé en allemand», rapporte-t-elle.

Résultat: une soirée gâchée: «Mon amie a pu assister à la projection, mais pas moi qui ne pouvais rien lire, ni sa cousine qui parle anglais», rapporte l’animatrice socio-culturelle à la Fédération suisse des sourds.

La Suisse est une île

La semaine dernière, Béatrice Grimm s’est énervée en lisant le «Bieler Tagblatt». Titre de l’article: «La Suisse est une île en ce qui concerne les versions originales». Une île qui s’effrite en raison du coût des sous-titrages et, selon les exploitants, de la préférence du public.

«Le public préfère-t-il vraiment entendre Freddie Mercury en allemand?», s’étrangle Béatrice Grimm, fan de Queen dans sa jeunesse, quand elle entendait bien.

Dans les deux langues

À Bienne, ville bilingue, la version originale a longtemps été privilégiée, avec un sous-titrage en deux langues, français/allemand. Motif: le doublage limite l’accès d’une séance à une seule communauté linguistique. Mais les temps changent…

Le Cinedome de la Tissot Arena, «une grande partie de notre public aime les films sans lire les sous-titres», selon une porte-parole de l’exploitant Kitag, citée par le «Bieler Tagblatt».

On comprend en lisant les propos de l’exploitante Edna Epelbaum que pour les films d’auteur, les cinéphiles restent attachés aux versions originales, mais que pour les films commerciaux, les versions doublées plaisent aux familles.

Discours inaudible

Pour Béatrice Grimm et sa collègue Madeleine Sigg, ce discours est inaudible: «On devrait même sous-titrer les films dans leur langue, à notre intention!», soutiennent ces malentendantes.

Une complainte pour une trentaine de sourds? «Non: une revendication pour le respect d’une minorité», rectifient Béatrice Grimm et Madeleine Sigg. Explication: la Suisse a ratifié une Convention de l’ONU relative aux droits des handicapés, laquelle mentionne clairement «le droit des personnes handicapées de participer à la vie culturelle».

Des applications? Non!

Des applications existent pour lire une traduction sur son smartphone, mais Béatrice Grimm et Madeleine Sigg n’en veulent pas: «Non merci! On veut regarder l’écran! Le texte doit être proche de l’image», disent-elles, en signalant aussi que la batterie de leur smartphone n’est pas constamment chargée.

«Tout à l’écran, le texte et l’image, c’est mieux!», répètent les deux amies. Béatrice Grimm argumente qu’au contraire des handicapés, les valides ont toujours le choix entre une deux variantes, «doublage ou sous-titrage, escalier ou ascenseur».

Leur mécontentement, Béatrice Grimm et Madeleine Sigg l’exprimeront peut-être dans un courrier à l’adresse des exploitants de salles. Leur souhait, c’est de pouvoir assister aux films dont on parle. Leur coup de cœur commun? «Billy Elliot», une romance sur un jeune danseur qui s’exprimait mieux par le geste que par la parole…