Et si Berne reconnaissait le langage des signes?

(nxp/ats)

Environ 10’000 sourds et un million de malentendants vivent en Suisse. Trois parlementaires veulent promouvoir leur intégration.

Le Conseil fédéral est prêt à étudier une reconnaissance juridique des trois langues des signes suisses. Il soutient, sans commentaire, trois postulats en ce sens.

Sa réponse publiée jeudi concerne les textes identiques des conseillers nationaux Mathias Reynard (PS/VS), Regula Rytz (Verts/BE) et Christian Lohr (PDC/TG). Les trois parlementaires demandent en particulier d’analyser si la reconnaissance juridique en tant que langue semi-officielle ou langue d’une minorité culturelle est possible.

Intégration entière

Ils souhaitent des mesures concrètes afin de promouvoir la langue des signes et la culture des sourds et de parvenir à une intégration entière des personnes sourdes et malentendantes. Le Conseil fédéral devra aussi répondre à plusieurs questions, notamment sur leur participation au marché du travail et à l’accès aux soins de santé.

Environ 10’000 sourds et un million de malentendants vivent en Suisse. La langue des signes est leur langue maternelle, rappellent les trois parlementaires. Ils sont désavantagés en matière de communication. Leurs compétences en lecture et en écriture sont plus faibles. Ils sont trois fois plus touchés par le chômage.

Pro Infirmis : des émoticônes inclusifs pour une société inclusive

(Pro Infirmis.ch)

Pro Infirmis lance ses propres émoticônes, parce que la 13e extension d’Unicode ne va pas assez loin.Parmi les 230 nouveaux icônes, il y en a certes qui illustrent le handicap, mais en recourant surtout à des moyens auxiliaires, comme une chaise roulante, une canne blanche, un appareil auditif ou une prothèse. Les personnes en situation de handicap ne se laissent pas réduire à de tels objets. Elles doivent être représentées comme des membres à part entière de la société, qui mangent, dansent, voyagent, rient, aiment et pleurent comme tout le monde. Les émoticônes devraient refléter une approche vraiment inclusive.

Pro Infirmis et l’agence CRK ont travaillé ensemble pour redessiner les émoticônes les plus courants. Ainsi, les utilisateurs peuvent choisir non seulement une couleur de peau, mais aussi ajouter un handicap. Les émoticônes proposés par Unicode ont pour conséquence de cimenter les différences et les préjugés au lieu de les surmonter.Afin que les personnes en situation de handicap soient perçues comme membres à part entière de la société, les émoticônes doivent les montrer comme tels. Nous allons encore plus loin, en introduisant un émoticône en situation de handicap qui en plus est désavantagé par son environnement. En effet, les personnes handicapées se heurtent au quotidien à de nombreux obstacles. C’est à cela que nous désirons sensibiliser le public.


émoticônes avec handicap

 

Pour plus d’informations Pro Infirmis Susanne Stahel, cheffe Communication et Récolte de fonds susanne.stahel@proinfirmis.ch 058 775 26 77

Six choses à savoir pour mieux vivre l’autisme

(La Côte)


TSA Vivre avec un enfant autiste exige des ajustements permanents et la volonté de se battre pour lui offrir le meilleur des thérapies efficaces. Des solutions existent dans la région.

 

PAR ANNE.DEVAUX@LACOTE.CH

De mieux en mieux diagnostiqués, les troubles du spectre autistique (TSA) sont difficilement pris en charge à la hauteur des besoins thérapeutiques des très jeunes enfants dépistés précocement. Sachant que la prévalence de l’autisme est d’une naissance sur cent, ce qui n’est pas pris en charge aujourd’hui sera d’autant plus lourd et cher à porter dans les prochaines années. Les TSA regroupent le syndrome autistique, le syndrome Asperger ainsi que des troubles envahissants non identifiés.Dans les grandes lignes, l’autisme perturbe sévèrement la communication et les interactions sociales, mais derrière cette définition large, chaque cas est singulier, plus ou moins sévère et autonome.

1) LA FICTION ET LA RÉALITÉ
«Le syndrome Asperger mis en scène par les séries télévisées à travers des héros géniaux est très divertissant, mais la réalité n’est pas glamour à rapporter dans les médias», confie Yves Crausaz, président de l’association Autisme Suisse romande, papa d’un fils autiste âgé de 20 ans. Bénédicte Eissa, maman d’une enfant autiste, présidente de l’association OVA autisme à Gland, enfonce le clou: «L’autisme est un trouble envahissant du développement et envahissant pour les proches aussi. On peut constater des dommages collatéraux importants dans les familles concernées tant la charge émotionnelle, financière et logistique est énergivore et chronophage.» L’un et l’autre recommandent donc de ne jamais porter l’autisme de son enfant sans se faire aider.

2) UN DIAGNOSTIC PRÉCOCE
Le canton de Vaud s’est doté d’un pôle d’excellence en la matière: le Centre cantonal autisme au Centre hospitalier universitaire vaudois (Chuv) qui a ouvert en septembre 2015, sous la direction de Nadia Chabane, pédopsychiatre et professeure. Un premier axe a été rapidement mis en place avec succès: la formation des pédiatres qui sont en première ligne pour détecter précocement les cas possibles avec des outils spécifiques. Les pédiatres envoient ensuite les enfants au CCA pour un bilan complet et un diagnostic fonctionnel très affiné. «Aujourd’hui, on peut diagnostiquer un enfant de 18 mois, avant cet âge-là, il faut rester très prudent, précise Nadia Chabane, bluffée par la qualité du diagnostic des pédiatres qui envoient les enfants au Centre. Une antenne du CCA pour l’ouest du canton ouvrira en septembre. Elle sera hébergée dans les locaux de la consultation ambulatoire du Service de psychiatrie pour enfants et adolescents du Chuv, à Nyon.

3) LA PRISE EN CHARGE
C’est là que le bât commence à blesser. Yves Crausaz dénonce la situation actuelle: «Les enfants sont diagnostiqués beaucoup plus vite et mieux,mais derrière, il y a peu de choses, voire rien: un service éducatif itinérant d’une à deux heures par semaine qui ne correspond aucunement aux besoins de l’enfant.» Nadia Chabane œuvre pour mettre à profit les plus jeunes années de l’enfant en développant des structures d’intervention précoce intensive, soit 20 heures par semaine, ainsi que des groupes de socialisation, mais elle admet que pour le moment, peu d’enfants y ont accès. «Avec un enfant diagnostiqué à 24 mois, nous avons deux ans pour modifier considérablement son parcours de développement»,précise-t-elle, c’est-à-dire deux ans pour changer son avenir avec pour objectif la scolarisation.

4) LA FORMATION DES PARENTS
Les enfants atteints de TSA exigent un travail énorme pour infléchir le développement du handicap. Cela signifie que les parents doivent être quasi-ment aussi bien formés que des professionnels pour prendre le relais des thérapies comportementales à la maison. Les formations sont délivrées, entre autres, aussi bien au CCA, qu’à Gland par l’association OVA que par Autisme Suisse romande à Lausanne. Sarah Tille, maman de Sacha, jeune autiste âgé de 10 ans, à Grens, confirme l’importance de bénéficier des formations et d’un suivi: «Nous sommes coachés par une thérapeute qui s’occupe de Sacha en séance individuelle et qui répond à toutes nos questions. Dès que je vois Sacha mettre en place un nouveau toc, je le désinstalle, il n’y a rien d’intuitif, il ne faut rien lâcher même pendant une journée.» Aussi bien chez les Tille que chez les Crausaz,le mot d’ordre est de continuer à vivre et de ne passe priver d’activités familiales, de sorties ou même de voyages. Mais tout se prépare avec patience.

5) LES AIDES FINANCIÈRES
Les thérapies comportementales intensives bénéficient d’une efficacité empirique très large et font partie des recommandations inter-nationales, mais ne sont pas financièrement prises en charge en Suisse. Les parents doivent trouver des fonds privés. Yves Crausaz insiste: «Une prise en charge précoce et intensive coûte entre 80 000 et 100 000 francs par an,mais 50% des enfants qui en bénéficient peuvent intégrer une scolarité normale.» Pour se faire accompagner, les parents ne doivent pas hésiter à se rapprocher des associations et des fédérations qui viennent en aide aux personnes handicapées, tous handicaps confondus, telles que Procap, qui a par exemple aidé la famille Tille pour le dossier de Sacha. Elles sont armées pour monter des dossiers auprès de l’Assurance Invalidité,mais également de toutes les structures susceptibles de participer au financement des thérapies précoces. L’association OVA propose des solutions de financement de la prise en charge par des sponsors privés. «Nous avons une personne qui passe son temps à faire du fundraising pour cela», précise Bénédicte Eissa.

6) LES PRINCIPALES STRUCTURES
Domicilié dans la région de Rolle,Yves Crausaz connaît bien les structures de La Côte. Son fils, tout comme le jeune Sacha Tille, est passé par l’association OVA à Gland. Spécialisée dans la thérapie A.B.A (analyse appliquée du com-portement), elle dispose d’un centre pour les enfants dès l’âge de deux ans et intervient également à domicile. La Fondation de Vernand scolarise les enfants dans des classes d’enseignement spécialisé qui font partie du dispositif scolaire et dont les prestations sont gratuites. Elle accueille les élèves à Nyon à l’Ecole pour enfants atteints d’autisme et dans deux classes au sein des collèges du Cossy et Marens, ainsi qu’à Morges au collège du Petit-Dézaley. Une nouvelle classe ouvre aussi à Cossonay à l’Ecole des Condémines. De plus,grâce à des dons, elle a développé des groupes de développement des compétences sociales pour les adolescents autistes. L’école de la Passerelle, à Lavigny, intègre tout type d’enfants ayant des difficultés scolaires importantes. La FEDEA School (Fondation pour l’éducation des enfants autistes), à Morges est bilingue. Toutes ces structures souffrent du même problème: le nombre de places limité.

On suivra les députés en langue des signes

(tdg.ch)

Les débats du Législatif genevois seront interprétés à l’intention des personnes sourdes. C’est une première suisse.


Des essais d’interprétation en direct ont déjà eu lieu lors de la prestation de serment du Conseil d’État en 2018. Image: LAURENT GUIRAUD

 

Comment dit-on «la séance est levée» en langue des signes? Les Genevois auront bientôt l’occasion de le savoir en suivant les débats de leur parlement cantonal. Dès la fin de l’année, le Grand Conseil devrait faire l’objet d’une interprétation dans ce système linguistique visuel développé à l’intention des personnes sourdes, en général celles qui le sont de naissance. L’État a lancé en juillet un appel d’offres, pour des prestations à délivrer dès le mois d’octobre. Le fournisseur devra aussi se charger de sous-titrer en français les débats parlementaires.

Les députés ont introduit cette exigence dans la législation en mars 2017, dans le cadre d’un débat sur la diffusion des débats du Grand Conseil. On s’attendait à ce que l’interprétation en langue des signes ne puisse commencer que lorsque le parlement aurait intégré sa nouvelle salle, en cours de reconstruction à l’Hôtel de Ville, en 2021. Mais la mesure pourra être anticipée.

Une longue gestation

«On a d’abord imaginé qu’une cabine serait nécessaire pour l’interprète dans la salle même du parlement, mais comme il est aussi possible d’effectuer l’interprétation et le sous-titrage à distance avant de restituer le tout sur le site internet du parlement, le projet peut être réalisé avant 2021», explique le sautier Laurent Koelliker, secrétaire général du Grand Conseil. Pour des raisons techniques, l’incrustation en langue des signes ne devrait en revanche pas être disponible dans la version diffusée sur la télévision locale. Des essais d’interprétation en direct ont déjà eu lieu lors de la prestation de serment du Conseil d’État en 2018 et lors de deux autres sessions.

«Un bon signal»

Le parlement genevois avait envisagé une traduction en langue des signes dès 2009, sur la base de propositions du MCG qui sont toutefois restées lettre morte.

L’impulsion a été reprise par le député PS Cyril Mizrahi, pointu sur les droits des personnes handicapées. Siégeant à la Constituante, il avait été à la manœuvre pour que la nouvelle charte fondamentale du canton, en force depuis 2012, reconnaisse la langue des signes dans son article 16. C’est aussi lui, comme député, qui a été à l’origine de l’amendement légal chargeant le Bureau du Grand Conseil de prendre «les mesures nécessaires concernant l’accessibilité des débats pour les personnes sourdes et malentendantes».

Aujourd’hui, l’élu se félicite de l’avancée du dossier. «C’est un bon signal pour les personnes sourdes et malentendantes, juge le socialiste. Faute notamment de pouvoir suivre les débats, celles-ci ont beaucoup de mal à se forger des opinions en matière politique. Pour celles qui sont sourdes de naissance, la langue des signes est la seule véritablement naturelle, et elle diffère autant du français tel que nous le parlons et l’écrivons que le mandarin.»

«Constamment écartées des sources usuelles d’information, les personnes sourdes sont très curieuses et impatientes de découvrir de nombreuses choses, dont la politique, estime pour sa part Sandrine Burger, porte-parole de la Fédération suisse des sourds. On n’a pas idée de ce qu’elles vivent: c’est comme habiter dans un pays dont on ignore la langue.»

La responsable souligne le caractère pionnier de la démarche genevoise: si des interprétations ponctuelles de débats politiques ont pu avoir lieu çà et là, aucun parlement suisse ne propose une traduction régulière en langue des signes. «On espère que cela donnera des idées aux autres», lance Cyril Mizrahi.

Selon la fédération, on compte quelque 800 000 personnes sourdes ou malentendantes dans le pays, dont 10 000 seulement pratiquent la langue des signes, alors que les autres seront sans doute intéressées par le sous-titrage. Aucune statistique régionale n’existe mais, par déduction, on peut imaginer que les pratiquants de la langue des signes ne sont que quelques centaines à Genève.

Reconnaissance concrète

L’effort n’est-il pas démesuré pour une si petite minorité? «On peut se dire que c’est trop cher pour si peu de gens, mais la Constitution genevoise reconnaît la langue des signes et la reconnaissance des droits ne saurait rester purement théorique», décoche Sandrine Burger.

Pour Cyril Mizrahi, le pas que franchit Genève devrait être l’occasion d’un débat plus large sur l’accès au débat démocratique. «Le vote électronique résolvait toutes sortes de problèmes pour les personnes qui ne peuvent pas remplir un bulletin papier de façon autonome, mais on est désormais de retour à l’âge de la pierre, pointe le député. Nombre de personnes avec un déficit intellectuel ou psychique sont privées arbitrairement de droits politiques, ce qui est contraire à la Convention sur les droits des personnes handicapées. Par ailleurs, que fait-on pour rendre le matériel de vote intelligible pour tous les votants?»

AI : Pas de baisse des rentes pour enfants

(nxp/ats)

La commission de la sécurité sociale du Conseil des États estime à l’unanimité qu’une réduction des rentes pour enfants n’est pas appropriée.


la baisse des rentes versées aux enfants des bénéficiaires de l’AI et de l’AVS déplaît au Conseil des Etats. (Photo: Keystone)

 

Les rentes versées aux enfants des bénéficiaires de l’AI et de l’AVS ne devraient pas être réduites. La commission de la sécurité sociale du Conseil des Etats s’écarte de la décision prise en mars par le Conseil national.

La Chambre du peuple voudrait faire passer les rentes pour enfants, rebaptisées «allocation parentale» à 30% au lieu de 40% de la rente du parent. La commission des Etats s’y oppose à l’unanimité, ont indiqué mercredi les services du Parlement. Pour elle, les décisions prises par le Conseil national sont trop drastiques et une réduction des rentes pour enfants n’est pas appropriée.

La commission a fait comparer la situation financière de familles ayant droit à des rentes pour enfants et à des prestations complémentaires (PC) avec celle de familles ne bénéficiant pas de ces aides. Dans tous les cas, il s’est avéré que les familles percevant des rentes pour enfants et des PC avaient un revenu moindre en comparaison avec celles qui n’y avaient pas droit.

Rentes linéaires

Par 8 voix contre 4, la commission a en revanche approuvé l’autre grand changement apporté par la réforme de l’assurance invalidité, soit le système de rentes linéaire pour les bénéficiaires qui présentent un taux d’invalidité situé entre 40 et 69%.

Pour la majorité, ce régime permettra de supprimer les effets de seuil et d’améliorer l’équité. Les bénéficiaires de rente pourront aussi rester plus longtemps dans la vie active.

La minorité considère au contraire que la baisse des rentes versées aux bénéficiaires présentant un taux d’invalidité situé entre 60 et 69% ne sera pas compensée par les améliorations apportées aux personnes avec un taux d’invalidité situé entre 40 et 59%.

Taux à 70% maintenu

Par 8 voix contre 3, la commission du Conseil des Etats a refusé une proposition pour fixer à 80% le degré d’invalidité requis pour obtenir le versement de la rente entière. Le taux est actuellement fixé à 70%. Une personne invalide à plus de 70% n’a guère de chances de pouvoir exercer une activité lucrative, a estimé la majorité.

En outre, vu la situation sur le marché de l’emploi, la commission propose à l’unanimité de faire en sorte que le passage au système de rentes linéaire n’entraîne aucune baisse des rentes versées actuellement aux bénéficiaires âgés de 55 ans et plus.

Ceux-ci devraient bénéficier d’une garantie des droits acquis. À l’instar du Conseil fédéral, le National souhaite que cette protection ne soit accordée qu’aux rentiers dès 60 ans.

La commission a encore pris acte du fait que la durée des formations élémentaires AI devrait en principe être maintenue à deux ans, même si la loi ne le prévoit pas expressément. Mais il devrait aussi être possible de proposer des formations plus courtes si nécessaire.

Par 9 voix contre 4, la commission souhaite que lors d’expertises, les entretiens entre l’assuré et le spécialiste fassent l’objet d’enregistrements sonores conservés dans les dossiers.

L’examen de la réforme n’est pas terminé. La commission s’y remettra lors d’une prochaine séance après avoir obtenu certaines clarifications de l’administration. L’objet devrait néanmoins pouvoir être traité lors de la session d’automne.