Aimée Mullins : Transhumaine trop humaine

(Bilan.ch)

Comme les superhéros de Marvel, Aimée Mullins a transformé son handicap en superpouvoir. Athlète, mannequin, actrice… elle endosse aussi le statut ambigu de star du transhumanisme. Portrait nietzschéen.


En 1996, elle battait le record du 100m et du saut en longueur aux JO Paralympiques d’Atlanta aux Etats-Unis / Stephane Feugere

 

Amputée sous les genoux à l’âge d’un an, Aimée Mullins est l’une des premières athlètes paralympiques à courir contre des championnes non handicapées avant qu’Alexander McQueen ne fasse d’elle un mannequin et Netflix une actrice (dans la série Stranger things). A chaque étape, son utilisation décomplexée des nouvelles technologies fait d’elle le symbole du transhumanisme. De la femme augmentée du futur.

Pourtant, rencontrée à l’occasion du Social Lab organisé par Cartier à San Francisco pour le lancement de la nouvelle collection des montres Santos, Aimée Mullins est plus humaniste que transhumaine. Si elle comprend qu’on fasse d’elle un symbole, c’est un statut qu’elle a dû apprivoiser émotionnellement. « J’y ai résisté pendant plusieurs années. On a écrit des livres sur moi, la cyborg. C’est très alarmant d’être une jeune femme et d’avoir des études académiques rédigées à votre propos», dit-elle. 

C’était avant de comprendre que cela n’avait rien à voir avec les technologies de ses prothèses et tout avec sa célébrité. « Quiconque devient une célébrité aujourd’hui doit s’attendre à ce que les gens vous objectifient. Vous passez à deux dimensions. Vous êtes une cause, un symbole. » C’est ce qui l’a décidée à assumer. « J’ai ressenti que ce que les gens disaient à mon propos était pour l’essentiel une fausse évaluation de ma psychologie. C’est beaucoup plus déshumanisant que n’importe quelle technologie dite transhumaine. »

Le message subversif de la mode

Entre autres au travers des travaux qu’elle mène avec Hugh Herr, spécialiste des prothèses biomimétiques au MIT, Aimée Mullins croit la technologie bien plus humaine que les fantasmes qui l’accompagnent. « Elles élimineront les handicaps d’ici un siècle. » Peut-être, mais ce qui alimente le transhumanisme aujourd’hui ce n’est plus l’homme réparé mais l’homme augmenté. « Tout le monde trouve des moyens d’augmenter son corps. Vous rentrez à la maison et vous commandez avec votre voix un gadget qui contrôle la musique, la TV, la lumière, comme par magie », commence-t-elle par se défendre avant d’ajouter : « La technologie augmente aussi notre anxiété. »

Une critique qui ne doit cependant pas masquer qu’Aimée Mullins a consciemment usé du flou artistique autour de son statut de cyborg pour hisser et entretenir sa célébrité. « C’est vrai, mais au départ, je ne pouvais pas avoir ces jambes pour courir. Je n’avais pas d’assurance maladie, pas d’argent. J’ai abusé mon corps pour les avoir. Et j’ai encore dû attirer l’attention des médias pour en parler de manière à trouver de l’argent. Les gens veulent que vous ayez le propos qu’ils voient pour vous. Je n’ai jamais eu de problème pour résister à cela. Jusqu’à ce que j’expérimente cette mise à plat de la célébrité. On retire le fait que vous avez des doutes, de l’insécurité. Les gens font comme si le soleil rayonne sur vous et la vie est belle. Et la vie est belle. Mais il y a eu aussi beaucoup de hauts et de bas. »

Aimée Mullins est une transhumaine finalement très humaine. Y compris dans son rapport à l’image. « Il y a quelques années, à Monterey, lors d’une conférence à laquelle je participais, les gens venaient vers moi en me parlant beauté, alors que je voyais d’abord le handicap. » Elle prend alors conscience que ce mélange de beauté et de handicap peut envoyer un message plus « subversif » que celui du sport paralympique.


Aimée Mullins -Dr

 

« Quand vous prenez le calendrier des maillots de bain de Sports Illustrated, c’est rempli d’amputation: nez refaits, poitrines augmentées, lèvres botoxées, explique-t-elle. Factuellement, ce sont des prothèses. J’ai compris que ce monde de la beauté était une arène que je pouvais utiliser pour rendre notre société plus tolérante vis-à-vis des différences.»
Auteur Fabrice Delaye

HandiLoge, passerelle entre immobilier et handicap

(24heures)

Par Anthony Baumberger, membre du comité de l’USPI Vaud*

Pro Infirmis Vaud a mis sur pied, il y a quelques années, un projet HandiLoge qui vise à soutenir concrètement l’obtention d’un logement pour des personnes en situation de handicap. En effet, il permet à ces personnes de conserver leur autonomie et de vivre de manière indépendante dans leur propre logement. Grâce à la motivation de ces potentiels locataires, au partenariat avec plus de quinze gérances et un soutien de Pro Infirmis qui clarifie les revenus issus des prestations, rentes ou allocations reçues par une personne à l’assurance invalidité, l’attribution de logements adaptés à ces locataires est favorisée.

Depuis 2017, l’USPI Vaud est de-venu partenaire de ce projet. Un membre du comité de l’USPI Vaud siège au sein du groupe de pilotage du projet. Ces contacts permettent à chacun des acteurs de comprendre les attentes et questionnements de l’autre et, en fin de compte, de trouver des solutions. Ces collaborations ont abouti à l’attribution de 79 logements à des personnes en situation de handicap.Le 19 février 2019, Pro Infirmis Vaud, en partenariat avec le Centre Patronal et l’USPI Vaud, a organisé une conférence intitulée «Métro-boulot-dodo, quels aménagements pour les personnes handicapées?». Celle-ci a permis un échange entre ces personnes et les mondes politique et immobilier.

L’USPI Vaud a conscience de l’importance du logement pour l’insertion sociale de l’individu. Par de tels partenariats, notamment, les professionnels de l’immobilier s’engagent pratiquement dans cette voie. Le monde associatif permet donc de trouver des solutions concrètes facilitant l’intégration de toutes et tous.www.uspi-vaud.ch

* Union suisse des professionnels de l’immobilier Vaud

Une campagne choc pour mieux saisir le handicap

(tdg.ch)

À l’occasion de son cinquantième anniversaire, la fondation Foyer-Handicap veut bousculer les a priori.


Une action de sensibilisation sans filtre est proposée par Foyer-Handicap pour inviter la population au dialogue. Image: DR

 

Faire évoluer durablement le regard porté sur le handicap: voilà ce qu’ambitionne Foyer-Handicap au moment de fêter ses 50 ans. Un livre commémoratif retrace l’histoire et souligne le caractère pionnier de cette fondation durant son demi-siècle d’existence.

Tout démarre en 1969, quand l’association Baobab, l’ancêtre de Foyer-Handicap, ouvre les portes de sa première résidence pour offrir de bonnes conditions d’accueil aux personnes en situation de handicap (ndlr: on compte cinq résidences aujourd’hui). À l’époque, rien d’équivalent n’existait à Genève ou en Suisse.

Echapper à l’exclusion

Depuis lors, cette institution n’a pas changé ses mots d’ordre – «innover, inventer, s’adapter» – pour que ses bénéficiaires puissent sortir des établissements médicaux, échapper à l’exclusion et trouver une place active dans la société. «Ces objectifs motivent toujours Foyer-Handicap à se battre pour le droit au logement, au travail, aux transports et aux loisirs, afin de favoriser l’indépendance des personnes en situation de handicap», indique Élisabeth Tripod-Fatio, porte-parole de la fondation.

Consciente du chemin qu’il reste encore à parcourir, celle-ci propose actuellement une action de sensibilisation pour inviter au dialogue. Affichée sur les murs du canton et visible sur les réseaux sociaux, cette campagne choc souhaite favoriser la compréhension du handicap tout en interpellant et en bousculant les a priori. Le concept est simple: sur chaque affiche, un enfant interroge naïvement et sans filtre son parent. «Dis Papa, pourquoi on lui parle comme à un enfant?» «Dis Maman, est-ce que le monsieur il est contagieux?» «Dis Papa, est-ce qu’il a des amis?» «Dis Maman, si on ne marche pas, on ne travaille pas?» En arrière-plan, on devine des résidents et des collaborateurs de Foyer-Handicap.

Soirée de gala le 20 juin

«Lors d’échanges emplis d’émotion, les créateurs de la campagne ont travaillé étroitement avec les équipes de Foyer-Handicap pour élaborer ces questions, souvent entendues par les résidents et les collaborateurs eux-mêmes», rapporte Élisabeth Tripod-Fatio. Même spontanéité en retour. Exemple: «Dis Maman, est-ce qu’il a mal le monsieur?» Réponse d’un résident: «Non, mais dans le regard des gens, oui.» Outre cette campagne bien enlevée, divers événements sont programmés pour fêter le cinquantième anniversaire de la fondation, dont une soirée de gala au Grand Théâtre, le 20 juin, avec un récital du ténor péruvien Juan Diego Flórez, accompagné du pianiste Vincenzo Scalera.

Une conférence-débat sur les défis liés au handicap suivra le 23 septembre à l’Université de Genève, en présence de Philippe Pozzo di Borgo, qui a inspiré le film «Intouchables», de la sportive Céline van Till et du Dr Nicolas de Tonnac, membre du conseil de fondation de Foyer-Handicap.

Enfin, des actions de sensibilisation seront menées dans les écoles par un collaborateur en situation de handicap.

Le Petit Prince avec des mots simples

(La liberté)

Pro Infirmis a écrit l’histoire « Le Petit Prince » en langage simplifié pour que tout le monde puisse la comprendre.

Tout le monde aime Le Petit Prince.Le Petit Prince est un très joli livre.Le Petit Prince raconte l’histoire d’un enfant qui vient des étoiles.Cet enfant, c’est le petit prince.Le petit prince se pose beaucoup de questions.Quand nous lisons Le Petit Prince,ça nous fait réfléchir et voyager.

C’est quoi le langage simplifié? Le Petit Prince est écrit avec des mots compliqués. Pro Infirmis a décidé d’écrire Le Petit Prince avec des mots simples.Comme ça, tout le monde peut comprendre cette histoire.Pro Infirmis est une association. Cette association aide les personnes qui ont un handicap. Pro Infirmis utilise une langue facile à lire et à comprendre. Cette langue s’appelle le langage simplifié. Des personnes en situation de handicap ont inventé le langage simplifié.Dans le langage simplifié, on utilise des mots simples.Dans le langage simplifié, on a un graphisme différent.Le graphisme, c’est la forme et la taille des lettres.


Le Petit Prince

 

Cet article est écrit en langage simplifié.Les personnes handicapées ont aidé Pro Infirmis Les personnes en situation de handicap doivent aider pour écrire en langage simplifié.Les personnes en situation de handicap peuvent dire si elles comprennent un texte.Les personnes en situation de handicap peuvent changer le texte.Ce sont 8 employés de la Fara qui ont aidé Pro Infirmis à traduire Le Petit Prince.La Fara est une entreprise où des personnes en situation de handicap travaillent.


Avec Pro Infirmis Fribourg et la Fara, fondation ateliers résidences adultes.Myriam Chenaux et Elisa Daini et Aude-May Lepasteur et Laurent Stoll ont écrit ce texte

 

Un complexe processus de traduction

C’est à Fribourg que Le Petit Prince a été adapté en langage simplifié. Un travail commencé en 2017.«J’ai adoré l’histoire, c’était un projet tellement bien», raconte Myriam Chenaux quand on lui demande de parler de son travail sur l’adaptation du Petit Prince.Laurent Stoll abonde: «C’est une histoire merveilleuse. Ce que j’ai préféré, c’est le renard, mais il y a plusieurs choses qui m’ont fait rire, comme le dessin du serpent.»Les deux employés de la Fara, une entreprise sociale qui engage des personnes en situation de handicap, ont participé à la traduction du célèbre texte de Saint-Exupéry en langage simplifié.Cette langue, créée dans les années septante par des personnes en situation de handicap aux Etats-Unis, rend des textes, qui peuvent parfois être très complexes, accessibles au plus grand nombre. Le langage simplifié exige qu’on utilise des mots simples et qu’on reprenne toujours les mêmes termes dans le texte, que les phrases soient courtes, que la police soit lisible (sans empattement) et le texte suffisamment gros et aéré. Le document doit être relu par des personnes ayant un handicap afin de s’assurer qu’il soit compréhensible. Ce sont ces règles que La Liberté a suivies pour l’article ci-contre.

C’est en 2017 que Pro Infirmis Fribourg s’est lancé dans la traduction du Petit Prince, explique Elisa Daini, du bureau langage simplifié de l’association fribourgeoise. Un gros travail qui porte aujourd’hui ses fruits:publiée en trois livrets formatA4, l’adaptation de l’œuvre de Saint-Exupéry vient de sortir de presse. Il était temps. Légitimement fiers, Myriam Chenaux et Laurent Stoll n’en pouvaient plus d’attendre! »AML>

Vernissage du Petit Prince en langage simplifié ce jeudi 11 avril dès 17 h 30,Pro Infirmis, rte St-Nicolas-de-Flue 2

Les HUG innovent pour les patients en situation de handicap mental

(rts.ch)

Première en Suisse: pour mieux soigner les personnes avec un handicap mental, les HUG ont créé une équipe spécifique. Une neurologue et une infirmière assurent le suivi de ces patients qui posent souvent des problèmes au personnel soignant.


Pour mieux soigner les personnes touchées par un handicap mental, les HUG ont créé une équipe spécifique. L’actu en vidéo / 3 min. / à 11:56

Anne-Chantal Héritier est neurologue. Depuis deux ans, elle occupe aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) le poste de médecin référent handicap dédié aux personnes avec une déficience intellectuelle, des troubles du spectre de l’autisme ou polyhandicapés. Elle est la seule en Suisse.

« Une spécialisation médicale du handicap n’existe pas », explique au 19h30 Anne-Chantal Héritier. « Il n’y a pas de FMH du handicap, donc j’ai eu le privilège de pouvoir composer mon poste ici comme médecin référent handicap aux HUG. »

Sa mission: faire le lien entre les différentes équipes médicales et des patients particulièrement vulnérables à l’hôpital. Stressés et anxieux, ceux-ci ont souvent du mal à communiquer et à comprendre les examens. Elle est là pour les leur expliquer et les rassurer.

Des « personnes ressources » pour l’équipe soignante

Avec l’infirmière Isabelle Royannez, elle représente également une personne ressource pour les soignants qui connaissent mal les spécificités de ces patients avec un handicap mental. Les deux femmes ont créé une fiche d’admission handicap, remplie par les proches ou les éducateurs qui donnent des informations précieuses pour la prise en charge.

« Ce sont des conseils pour rentrer en contact avec la personne (…): qu’est-ce qui est fait habituellement et qui fonctionne pour la douleur, pour le rassurer… », précise Isabelle Royannez. L’infirmière est souvent appelée par le service des Urgences pour mieux prendre en charge la personne en situation de handicap, notamment pour éviter de la faire trop attendre, au milieu d’autres patients.

« Si on arrive à soigner les personnes en situation de handicap avec une déficience intellectuelle, c’est qu’on arrivera à soigner le reste de la population. Si on est bon avec eux, on sera bon avec tout le monde », estime-t-elle.

Actuellement, 538 patients en situation de handicap mental sont référencés aux HUG avec une fiche d’admission handicap.


Ecouter les précisions de la spécialiste Séverine Lalive d’Epinay Raemy dans le 19h30:

Un meilleur suivi à l’extérieur de l’hôpital

Mieux soigner, c’est également assurer un meilleur suivi à l’extérieur de l’hôpital. Une fois par trimestre, Anne-Chantal Héritier participe aux consultations organisées dans un foyer avec le personnel soignant de l’établissement et les proches des résidents. Essayer un nouveau médicament, prévoir un examen, une opération, tout est discuté en équipe avec la famille car l’objectif est de prendre en charge la personne dans sa globalité.

Pour Anne-Chantal Héritier, sa mission résonne par ailleurs avec son histoire personnelle. « J’ai un frère aîné en situation de polyhandicap et je pense que c’est ça qui a orienté mon parcours professionnel », confie la neurologue. « Et oui cela donne sens à ma profession d’essayer de comprendre les personnes en situation de handicap et les soigner le mieux possible. »

Exception dans le monde médical suisse, ce poste de référent handicap s’inscrit pourtant dans une démarche plus large: le retour d’une médecine à visage humain.

Fanny Moille