« Tous de la même pâte »

(Presseportal/ats)

« Tous de la même pâte »:le 3 décembre, Pro Infirmis promeut l’inclusion en Suisse à l’aide de bonshommes en pâte différents

 

Le 3 décembre, Journée internationale des personnes handicapées, plus de 680 boulangeries de Suisse proposeront des bonshommes de la St-Nicolas différents : en fauteuil roulant, avec un seul bras ou encore une seule jambe, qui rappellent la diversité de notre société.

Le vendredi 3 décembre est la Journée internationale des personnes handicapées. Ce jour-là, on trouvera des bonshommes de St-Nicolas/Grittibänz un peu différents : certains n’ont qu’un bras, qu’une jambe ou bien sont en fauteuil roulant. Pour cette campagne, Pro Infirmis s’est associée à plus de 680 boulangeries et magasins de Suisse, afin de promouvoir une société inclusive, qui considère la diversité des êtres humains comme étant une richesse. En effet, nous sommes toutes et tous différents, et pourtant, nous sommes « toutes et tous faits de la même pâte ».

Ces bonshommes de St-Nicolas qui diffèrent quelque peu de la  » norme  » sont tout aussi bons que les autres et engagent au dialogue, dans les magasins, à la maison ou au travail. Les bonshommes avec handicap ont le même poids et coûtent le même prix que les bonshommes traditionnels. Ils ne sont pas vendus pour récolter des dons mais pour sensibiliser à l’inclusion.  » Maman, pourquoi mon bonhomme n’a qu’une jambe ?  » C’est de telles questions que nous voulons susciter.

« Tous de la même pâte » : un événement dans toute la Suisse

Pro Infirmis mène cette action en collaboration avec des boulangeries de toutes les régions du pays. Plus de 680 succursales vendent des Grittibänz un peu différents. Cette année, l’action a lieu pour la première fois dans toutes les régions linguistiques. Cette action a été lancée en 2019 à Glaris par des personnes en situation de handicap, en collaboration avec Pro Infirmis. Étendue l’année suivante à d’autres cantons alémaniques, elle a remporté un tel succès que les directions cantonales de Pro Infirmis de toute la Suisse ont décidé d’en faire une campagne nationale cette année.

Événements inclusifs dans toute la Suisse

Pro Infirmis organise plusieurs événements originaux visant à favoriser le dialogue pour le jour J. Y participent des personnes en situation de handicap et des personnalités des milieux politiques, sociaux et sportifs. Bon nombre de personnes concernées et de bénévoles participeront à la préparation et à la vente des bonshommes dans les boulangeries. Des personnes en situation de handicap distribueront des bonshommes de St-Nicolas, notamment dans des parlements cantonaux.

Vous trouverez une liste des événements dans les cantons sur le site de Pro Infirmis: proinfirmis.ch/pate

Campagne en ligne

Depuis mi-novembre, nous menons une campagne de sensibilisation sur les réseaux sociaux. Des personnes avec et sans handicap de toutes les régions linguistiques se mobilisent pour notre action et publient leurs propres actions Grittibänz sur leurs médias sociaux. Le jour J, nous couvrirons l’événement en direct sur nos canaux dans toutes les régions de Suisse.

L’Art sans voir

(Le Courrier Genève)


Alix Fiasson et Roine Kouyo Ouamba devant la maquette du Lac de Thoune aux reflets symétriques (1909) de Ferdinand Hodler.SSG

 

A l’image du Musée d’art et d’histoire de Genève, plusieurs institutions suisses favorisent l’accès de leurs œuvres aux personnes aveugles ou malvoyantes. Enjeux

Samuel Schellenberg

«C’est pas parce qu’on a le sens de la vue qu’on sait regarder une œuvre.» Face à l’art, une bonne dose de relativisme est donc de mise, estime Isabelle Burkhalter, responsable de la médiation culturelle au Musée d’art et d’histoire de Genève (MAH). N’empêche, si la vue vous manque, l’exercice de compréhension d’une pièce se complexifie. Et même radicalement.

Ce n’est pas Roine Kouyo Ouamba qui dira le contraire, dans le dédale des espaces«beaux-arts» du musée encyclopédique. Et pourtant, aveugle dès la petite enfance, le Camerounais de 28 ans se fait intarissable lorsqu’il décrit ses artistes favoris. «J’adore parler de Hodler aux personnes de ce pays», s’esclaffe le jeune homme, arrivé à Genève il y a trois ans. «Roine a eu un coup de foudre pour ce peintre», s’amuse la médiatrice culturelle Alix Fiasson.

«Apprendre une oeuvre sans la voir demande trois fois plus d’effort»
Roine Kouyo Ouamba

Si nous avons rendez-vous au MAH, c’est pour parler du système de plans tactiles Virtuoz. A l’initiative de Roine Kouyo Ouamba, à l’époque en stage avec Alix Fiasson, le musée s’est équipé en pionnier de cet outil, jusqu’alors essentiellement développé pour des entreprises et autres lieux publics de France. Au MAH, deux types de plans ont été conçus pour l’étage des collections: un grand, à l’entrée, avec une présentation large; et des formats portables, avec plans des salles, que les personnes intéressées peuvent emporter avec elles.

Par des éléments interactifs en relief, l’instrument prévient par exemple qu’il y a «trois marches» et décrit certaines oeuvres, avec la voix d’Alix Fiasson – une option entièrement fonctionnelle en janvier prochain. «On parle beaucoup d’accessibilité mais rarement d’autonomie», note Roine Kouyo Ouamba, qui s’est formé à la communication d’entreprise à Yaoundé. Or ce n’est pas tout d’arriver jusqu’aux salles du MAH, encore faut-il pouvoir s’y repérer, ce que ce plan permet justement. Avec parfois des mises à jour à effectuer, notamment lorsque les commissaires piochent dans les classiques de la collection pour les expositions temporaires, créant des «trous» aux murs.

Démarche à expliquer

«Les personnes en situation de handicap sont 300 000 en Suisse, un nombre qui pourrait doubler d’ici 2050, entre vieillissement de la population et apparition de nouvelles pathologies», explique Isabelle Burkhalter. Rendre un musée accessible est donc loin d’être une lubie destinée à une minorité, ce qui a poussé le MAH à intensifier dès 2011 sa politique de médiation accessible. «Toute l’offre a été développée avec les personnes qu’elle concerne principalement, précise Isabelle Burkhalter. Et le premier public cible était celui des personnes aveugles ou malvoyantes, avec une approche multisensorielle et la volonté d’être inclusif plutôt que simplement accessible. C’est une démarche qui sert à tout le monde.» C’est aussi le cas du plan Virtuoz.

En 2011, il a fallu expliquer le choix de l’inclusivité, «préciser que non, les chiens pour aveugles ne vont pas faire pipi contre les statues, sourit Alix Fiasson. Or ce choix va désormais de soi.» Couronnement du processus, le musée reçoit en2019 le label Culture inclusive de Pro Infirmis, attribué aux institutions culturelles engagées sur la voie de l’inclusion et de la participation culturelle.Sur le gros milliers de musées que compte la Suisse, seule une trentaine sont labellisés.

«Regardez les rides et cette barbe!»

Lors de notre visite au MAH,dans la salle des Hodler, trois toiles se prolongent par des bas-reliefs réalisés par Ouitterie Ithurbide, cofondatrice de l’association vaudoise L’Art d’inclure avec Muriel Siksou et Gabrielle Chapuis. Décédée récemment, la plasticienne a produit une quinzaine de bas-reliefs d’œuvres du musée, dans lesquels le degré de luminosité s’exprime par la texture, plus ou moins lisse. «Regardez les rides et cette barbe!», s’enthousiasme Roine Kouyo Ouamba en parcourant des doigts la version 3D de l’Autoportrait à la cravate du grand Ferdinand.

Il sera moins à l’aise avec le bas-relief d’une vue lacustre,jamais touché auparavant, dont la symétrie parfaite entre paysage montagneux et reflet est troublante. «Apprendre une œuvre sans la voir demande trois fois plus d’effort», pointe celui qui a lui-même mené des visites d’exposition au MAH, à destination d’un public voyant.

Récemment, Alix Fiasson a mené une visite guidée de l’exposition temporaire «Pour la galerie. Mode et portrait», sur l’évolution de la mode en Europe. Le tour incluait le toucher de différents éléments vestimentaires tels qu’une crinoline, un corset ou une fraise. Et lors de l’exposition temporaire «César et le Rhône», en 2019, «nous avons fait produire des amphores avec vin, garum ou huile d’olive», afin d’impliquer l’odorat, se souvient Alix Fiasson.

«Les visites les plus marquantes sont celles qui incluent des expériences ludiques»
Céline Witschard

«En général, les visites les plus marquantes sont celles qui incluent des expériences ludiques et font intervenir d’autres sens que la seule ouïe. Il s’agit d’aller au-delà de l’écoute d’explications oralisées, pour désintellectualiser le propos et rendre les choses agréables»,estime au bout du fil Céline Witschard, jeune entrepreneuse qui a fondé Vision Positive, structure genevoise spécialisée dans
l’accessibilité.

Des têtes vont tomber!

Dépasser les seules explications orales permet aussi de justifier le déplacement au musée, alors que la plupart des audiodescriptions enregistrées peuvent être écoutées au domicile, via le site des musées. Avec d’ailleurs un succès certain durant le semi-confinement, souligne Alix Fiasson – elle en a profité pour produire plusieurs nouvelles immersions dans des œuvres ou expositions. Autre grande motivation à sortir de chez soi: la dimension sociale. «Souvent, les visites en groupe vont bien au-delà de la plongée dans une exposition, explique Alix Fiasson. C’est une véritable excursion, avec repas en commun. Au fil des années, j’ai développé un fichier d’adresses avec toutes les personnes aveugles et mal-voyantes intéressées par ces visites.»

Dans ce musée riche en sculptures, est-il possible de toucher les oeuvres originales? «Cela peut arriver, mais toujours avec des gants en latex», explique Alix Fiasson. Elle prépare pour demain samedi(14h) une visite thématique sur «Les têtes coupées du musée», avec zigzags entre des Judith,Salomé et David exhibant les caboches d’Holopherne, Saint- Jean Baptiste et Goliath. «Et à la fin du parcours, on pourra toucher une épée de la collection, qui servait aux décapitations à Genève!» La proposition s’adresse à la toute nouvelle Section jeunes de la FSA, Fédération suisse des aveugles et malvoyants. «Mais vous pouvez tout de même l’indiquer dans l’article, d’autres personnes auront peut-être envie de venir!»

Soulages mal expliqué, «c’est pas drôle du tout!»

«Quel est votre souvenir le plus marquant d’une visite dans un musée?» Nous avons posé la question à plusieurs personnes aveugles ou malvoyantes. Témoignages

Malvoyante depuis quarante ans, Pierrette Grosjean, 78 ans, a «découvert un monde» grâce aux visites organisées par l’Art d’inclure (lire ci-dessous). «Je me souviens en particulier d’un tour à l’exposition de Giuseppe Penone au Musée cantonal des beaux-arts de Lausanne», le MCBA, en 2015-2016, avec la médiatrice Sandrine Moeschler. Un artiste italien proche du courant de l’arte povera, dont elle aurait volontiers visité l’atelier. «J’aime la nature, alors davantage que ses dessins ou tableaux, ce sont ses troncs que j’ai tout spécialement appréciés.» Des oeuvres de bois, bronze ou or, qu’il n’a pas été possible de toucher, note celle qui apprécie la présence d’un gigantesque arbre de Penone dans l’entrée du nouveau MCBA, tout en trouvant ce nouveau musée «trop grand».

Pierrette Grosjean se souvient aussi d’une visite de l’exposition de Zao WouKi à la Fondation Gianadda, en 2016 – un artiste à la touche expres- sive. «J’avais l’impression de le voir peindre!» Elle souligne le rôle central de la personne chargée de la médiation: «Si vous allez voir une exposition de Soulages, qui peint essentiellement en noir, et que ce n’est pas la bonne personne qui vous explique son travail, ce n’est pas drôle du tout! (rires)» Elle note que si sa maladie visuelle est hélas héréditaire, la passion pour l’art semble l’être aussi: malvoyante, sa petite fille est devenue étudiante en art à la HEAD de Genève.

Céline Witschard se souvient de l’exposition sur les fourmis organisée entre 2017 et 2019 au Muséum de Genève, «en particulier la première partie, super ludique, avec des modèles agrandis de ces insectes, dont on pouvait toucher les mandibules. J’ai même eu la grande surprise de me faire asperger avec un liquide imitant l’acide formique.» Plus généralement, Céline Witschard a savouré la dimension multisensorielle de l’exposition et le choix du bois pour les modèles à toucher, «avec l’assurance qu’ils ne se dégraderont pas en cours d’exposition». Récemment, Céline Witschard a apprécié une visite au Musée de la photographie de Vevey, qui ncluait le développement de photogrammes.«Dans le labo, sans lumière, nous étions à égalité avec les personnes qui voient.» Ou même peut- être «plus à l’aise que nos accompagnants», complète par courriel une autre participante.

Rosalind Zaugg mentionne une visite au MAH, durant laquelle Alix Fiasson a présenté des sculptures de femmes. Notamment celle d’Elisabeth Charlotte de Bavière, découverte par le biais d’un bas-relief. «Ce qui m’a surtout plu, c’est quand Alix nous a lu quelques lettres qu’Elisabeth avait écrites sur sa vie à Versailles et sur son mari», qui soulignaient l’intelligence et l’esprit vif de cette autrice d’innombrables missives.

Hervé Richoz, qui a perdu la vue dans un accident, mentionne d’abord une expérience négative: celle faite à l’entrée de la Fondation Beyeler de Bâle, après un long périple pour se rendre sur place, où on lui signifie (à tort) que sa carte AI n’est pas valable. «C’est un problème récurrent, provoqué par de la méconnaissance – après, on reçoit en général des excuses écrites de la direction… Mais une visite réussie débute dès l’entrée, avec un bon accueil et des indications pertinentes. C’est hélas souvent ce que les musées oublient de faire.»

Sur une note cette fois positive, Hervé Richoz évoque une visite au Musée d’art du Valais, à Sion, autour d’une œuvre toute en fractales de Gustave Cerutti, expliquée à l’aide d’un jeu d’encastrement pour enfants. «Pour nous expliquer l’abstraction, la médiatrice a fait un truc génial: elle a mis la musique qu’écoutait l’artiste lorsqu’il a composé la peinture. Pour nous, c’était un moment de communion artistique extraordinaire.»

Pour l’anecdote, Hervé Richoz est à la base de l’exposition «Toucher voir», au Musée d’art du Valais en 2010, avec un dispositif encore en place développé en collaboration avec la Fédération suisse des aveugles et malvoyants (FSA). En font partie des maquettes et autres échantillons de matières, présents dans les salles d’exposition. Le dispositif est complété par un marquage au sol et un audioguide. «Aujourd’hui, le personnel du musée s’est largement approprié les maquettes», par exemple pour indiquer son chemin au public, se réjouit Hervé Richoz.SSG


Maquettes au MAH du Portrait de Jeanne Pontillon (1894) de Berthe Morisot, de deux autopotraits de Hodler et de Persée tuant le dragon (1910) de Félix Vallotton. MAH/S5G/MAH

 

Un signal pour l’inclusion

Avec son label Culture inclusive, Pro Infirmis désigne les «institutions culturelles qui s’engagent durable-ment sur la voie de l’inclusion et de la participation culturelle». Offre, accès aux contenus et aux lieux, emplois et communication: tout est pris en compte afin de garantir une visite optimale, quel que soit le handicap.

Sur environ quatre-vingts institutions qui ont reçu le label, une trentaine sont des musées. Dont le MAH et l’Ariana genevois, le Musée cantonal des beaux-arts de Lausanne, le Musée national suisse à Zurich, le Musée historique de Bâle ou le Centre Paul Klee à Berne. Trente musées sur le bon millier que compte la Suisse, ce n’est pas grand-chose. Mais il faut relativiser, explique Nicole Grieve, responsable romande de Culture inclusive: le label est récent et géré par une petite équipe. Aussi, de nombreuses institutions non labellisées «n’en font pas moins du bon boulot». C’est par exemple le cas de la Collection de l’art brut, à Lausanne, par l’entremise de la médiatrice Malie Genest et l’Art d’inclure. On y profite du projet de médiation «A l’écoute des œuvres» et de plusieurs audiodescriptions de pièces majeures.

Nous soutenons fermement ces initiatives qui encouragent l’accès sans barrière et l’accès aux musées pour les personnes malvoyantes et aveugles», commente Katharina Korsunsky,secrétaire générale de l’Association des musées suisses (AMS) et du Conseil international des musées, section helvétique. L’association a cosigné un Charte pour la promotion de l’audiodescription en 2020, «avec pour but de favoriser l’accessibilité des événements culturels et des manifestations sportives aux personnes atteintes d’une déficience visuelle».

Reste qu’en matière d’accessibilité et d’inclusivité, la Suisse est passablement en retard,comparée à la France notamment. En cause, selon Nicole Grieve: le fédéralisme, l’esprit libéral individualiste, le partage en régions linguistiques ou l’absence de cadres légaux réellement contraignants. Mais aussi une absence de culture activiste à l’anglo-saxonne, du côté de la base. Les manifs au musée, c’est pour bientôt? SSG

Décrire pour donner à voir

A l’image du MAH, de plus en plus de musées proposent des descriptions audio de certaines œuvres, accessibles depuis leur site internet ou via smartphone. Au même titre que les visites guidées, l’audiodescription doit permettre aux personnes aveugles ou malvoyantes de se créer des «images mentales». Ces dernières ne seront évidemment pas les mêmes selon le degré du handicap.

Pour que les images se forment, on procède par le biais de descriptions détaillées, avec l’évocation du genre pictural – est-ce de l’art abstrait ou figuratif, s’agit-il d’un courant célèbre?-, des techniques employées, du contexte de création et autres éléments biographiques. «La question est aussi de savoir où on ‘dépose’ son émotion, explique Hervé Richoz. Si vous, en tant que personne voyante, entrez dans une salle et dites `wow’ à la vue d’une oeuvre, l’enjeu sera de m’expliquer ce qui a valu votre exclamation. Or pour le faire, vous commencerez toujours par poser le décor, en partant du global pour aller au spécifique.»

L’audiodescription et les audio-guides grand public n’ont pas les mêmes visées: alors que les premiers opèrent littéralement des plongée dans une œuvre, pour palier l’absence de vue, les audioguides sont le plus souvent des accompagnants, pour expliquer les visées d’une exposition et contextualiser les œuvres, sans forcément évoquer la couleur du ciel. C’est le cas des présentations d’œuvres du MCBA lausannois, disponibles sur l’application du musée, par ailleurs excellente. L’institution dit vouloir «respecter l’expérience des personnes face à l’original» et «miser sur l’audio pour inciter à ne pas quitter les œuvres des yeux». Ce que le public aveugle ou malvoyant ne pourra pas faire.

On notera que les personnes aveugles de naissance ne sont statistiquement pas le plus intéressées par les musées ou l’audiodescription, selon Alix Fiasson. «Ce public n’a pas de code couleur ou iconographique, donc la description ne lui sert pas à grand- chose.» Deux personnes aveugles de naissance, «très cultivées et s’intéressant à tout», n’en viennent pas moins à chacune de ses visites.

Ouid des applications pour smartphone qui décrivent des objets à partir de ce qu’elles voient? Pour l’instant très basiques dans leurs analyses, elles ne sont pas prêts de supplanter l’approche humaine et tout le savoir qui l’accompagne. Car entendre qu’une peinture contient un monsieur à l’oreille bandée ou une dame renaissante avec un sourire énigmatique sera peut-être un peu court. SSG

Une association pour l’amour de la culture

Pour Muriel Siksou, la culture est l’essence même de la vie. «Je ne voulais pas que mon handicap visuel m’empêche de faire ce que j’aime!» C’est notamment pour cela qu’elle cofonde L’Art d’inclure en 2015, avec Ouitterie Ithurbide et Gabrielle Chapuis, «pour rendre la culture accessible aux personnes en situation de handicap visuel et de surdicécité, un double handicap sensoriel». Mais aussi à tout public intéressé, ajoute la secrétaire médicale de formation, atteinte d’une maladie de la rétine dégénérative.

L’association propose principalement des visites guidées dans les musées. Oui sont autant d’actes militants: «Amener les personnes concernées sensibilise l’institution muséale à l’accueil de notre public, estime Muriel Siksou. Nous pointons la déficience visuelle et proposons des facilités également dans les festivals de la région vaudoise.»

Par exemple des concerts dans le noir au Cully Jazz Festival: «Le concept est que les personnes mal-voyantes ou aveugles amènent le public voyant mis en situation de handicap visuel, à leur place, dans le noir. Après avoir vécu cette expérience sensorielle, nous rallumons tout doucement la lumière et échangeons à ce propos avec les participantes.» Et début décembre, l’association collaborera avec le Festival des Urbaines lausannois pour un programme d’inclusivité de son exposition à l’Espace Arlaud.

Muriel Siksous aimerait que les outils sensoriels comme les bas-reliefs soient disponibles en permanence pour les personnes en situation de cécité, «pas juste pour se donner bonne conscience pendant une visite guidée. C’est l’une de nos nombreuses batailles.» Au MAH, on les sort un week-end par mois. SSG

Blue Beanie Day – Internet pour tous

(UCBA)

Les contenus des sites web doivent pouvoir être consultés aussi bien par les personnes en situation de handicap visuel, auditif, moteur ou mental que par les personnes qui ne sont pas en situation de handicap. Le Blue Beanie Day, qui a lieu chaque année le 30 novembre, rappelle que les personnes en situation de handicap se heurtent à des obstacles en partie insurmontables sur Internet.

Les personnes en situation de handicap utilisent Internet beaucoup plus fréquemment que la moyenne de la population. Pour qu’elles puissent le faire, les sites Internet doivent être conçus de manière accessible. Une taille de police adaptable, un bon contraste, des textes de remplacement pour les images, des contenus en langage simplifié et la navigation à travers un lecteur d’écran ne représentent que quelques aspects de l’accessibilité sur le web.

Internet n’est devenu accessible que grâce à la définition de normes et directives (Web Content Accessibility Guidelines, WCAG) et il reste encore beaucoup à entreprendre : la dernière étude suisse sur l’accessibilité a montré que seul un quart de 41 boutiques en ligne testées peuvent être bien à très bien utilisées par les personnes en situation de handicap. Grâce à des contenus web accessibles et des moyens auxiliaires techniques, les personnes en situation de handicap peuvent par exemple s’informer en ligne sur une destination de voyage et faire une réservation. Cela n’a pas été le cas pendant longtemps et l’aide d’un tiers était auparavant toujours requise. Malheureusement, aujourd’hui, une aide visuelle est encore souvent nécessaire pour pouvoir effectuer un clic sur un bouton qui n’est pas accessible.

La Journée du bonnet bleu (en anglais: Blue Beanie Day), le 30 novembre, est une célébration internationale annuelle des normes web et de l’accessibilité d’Internet qui a commencé en 2007. En 2021 aussi, l’Union centrale suisse pour le bien des aveugles UCBA, la fondation Accès pour tous, la Fédération suisse des sourds FSS, Procap, Inclusion Handicap, AGILE.CH, l’Action Caritas pour les aveugles (CAB), l’Union suisse des aveugles (USA) et la Fédération suisse des aveugles et malvoyants (FSA) veulent sensibiliser la population à l’importance de sites accessibles et du respect des normes web pour les personnes concernées.

Et quel est le rapport avec le bonnet bleu? Sur la couverture de son livre „Designing with Web Standards“ (concevoir avec les normes web), le développeur web américain Jeffrey Zeldman porte un bonnet bleu. Aujourd’hui, il est devenu le symbole du mouvement en faveur des normes web.Plus d’informations sur les principes d’accessibilité du web

Quel revenu peut encore obtenir une personne malgré des atteintes à sa santé ?

(Inclusion-Handicap)

Le Tribunal fédéral examinera le 17.11.2021 un cas dans le domaine des assurances sociales dont l’impact sera très important pour toutes les personnes assurées en Suisse et qui concerne ainsi potentiellement toutes les citoyennes et tous les citoyens (8C_256/2021). En substance, il s’agit de savoir quel revenu hypothétique réalisable (revenu d’invalide) l’AI peut prendre en compte pour une personne handicapée, ou en d’autres termes: quel revenu peut encore obtenir une personne malgré des atteintes à sa santé? Dans la perspective des délibérations publiques du Tribunal fédéral, les organisations de personnes handicapées ainsi que l’Association suisse des assurés (« Versicherte Schweiz ») et les syndicats soulignent au moyen de ce communiqué de presse la pratique intenable en la matière.

Pour déterminer le degré d’invalidité, la pratique actuelle détermine le revenu d’invalide à partir du salaire médian de l’enquête suisse sur la structure des salaires (ESS). Cette statistique est réalisée par l’Office fédérale de la statistique sur la base des salaires des personnes ne souffrant pas d’atteinte à la santé. En 2018, le salaire médian mensuel des hommes occupant un poste sans responsabilité dans une activité simple physique ou manuelle était de Fr. 5 417 par mois sur la base d’une semaine de 40h. Ceci correspond pour l’année 2020 à un salaire annuel de Fr. 69’000.-[1]. En 2021, l’étude du BASS ainsi qu’un avis juridique de Gächter/Egli/Meier/Filippo ont démontré pour la première fois ce que les personnes atteintes dans leur santé peuvent réellement gagner. Il a été clairement établi que les rentières et les rentiers AI exerçants une activité lucrative gagnent environ 14 à 17% de moins que le salaire médian selon l’ESS. Les experts concluent que la valeur médiane ne doit dès lors plus être utilisée comme base de calcul dans le domaine des assurances sociales, mais qu’à l’avenir le quartile inférieur de l’ESS doit être déterminant ou qu’une déduction générale de 15% doit être effectuée. [2]

En d’autres termes, ses dernières années des salaires auxquels des personnes atteintes dans leur santé ne peuvent prétendre ont régulièrement été admis. Ceci induit des taux d’invalidité plus faibles ou des refus de prestation. Les organisations signataires de ce communiqué de presse sont d’avis, que la pratique actuelle ne peut être maintenue au vu de ces nouvelles connaissances. Cette pratique discrimine non seulement les bas revenus, mais aussi beaucoup de personnes qui dépendent à un moment donné des prestations de l’AI. Elle n’entraîne pas uniquement des refus de rentes assurant le minimum vital, mais exclus des personnes atteintes dans leur santé aussi des mesures professionnelles puisque celles-ci présupposent un degré d’invalidité d’au moins 20%. Cette pratique empêche également la réalisation d’un des buts importants de l’AI : l’intégration des personnes avec un handicap. Les organisations signataires sont d’avis que la pratique actuelle du Tribunal fédéral mais aussi le Règlement sur l’assurance-invalidité qui entrera en vigueur le 01.01.2022 et qui définit le salaire médian comme étant déterminant ne sont pas admissibles au vu des nouvelles connaissances. Cette approche paraît difficilement compatible avec la Constitution fédérale et la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH).


[1] Voir ESS TA1_tirage_skill_level, secteur privé, Suisse. (Fr 5’417 x 12) : 40h x 41.7h : 101.6 x 103.4 = Fr. 68’967.
[2] Voir étude BASS IV ainsi que le rapport Gächter et al S. 69; les deux rapport peuvent être téléchargés (en allemand) sous: https://www.wesym.ch/de/medien


Renseignements

Petra Kern, responsable du Département Assurances sociales Inclusion Handicap
079 714 07 37, petra.kern@inclusion-handicap.ch

Colloque du 3 décembre 2021: «Participation et accessibilité»

(Bureau fédéral de l’égalité pour les personnes handicapées BFEH)


Colloque du 3 décembre 2021: «Participation et accessibilité»

 

À l’occasion de la Journée internationale des personnes handicapées, le Bureau fédéral de l’égalité pour les personnes handicapées (BFEH), l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) et le Secrétariat général de la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS) organisent un colloque consacré au droit d’être consulté et à l’accessibilité. Le colloque s’adresse aux autorités communales, cantonales et fédérales, aux organisations et associations de personnes handicapées, aux personnes avec et sans handicap ainsi qu’aux membres de la communauté scientifique.

Le colloque a lieu à Berne le 3 décembre 2021 à la BERNEXPO (tram 9, arrêt Guisanplatz, ou S-Bahn, arrêt Wankdorf). Le colloque est gratuit et les interventions auront lieu en français et en allemand (avec interprétation simultanée allemand/français et DSGS/LSF). Il y aura aussi des sous-titres (allemand/français).

L’accent sera mis sur la vie politique et la vie publique, ainsi que sur la liberté de choix et le droit d’être consulté des personnes handicapées dans les domaines du logement et du travail. Le programme a été mis sur pied en étroite collaboration avec des personnes handicapées et leurs organisations, ainsi qu’avec des associations professionnelles. Pour accéder au colloque il faudra présenter un certificat COVID valide.


Colloque « Participation et accessibilité » 3.12.2021 (PDF)

Inscription

Programme

Brochure du Colloque Participation et Accessibilité 2021(PDF)

Comment s’y rendre

Si vous avez besoin d’aide pour trouver le chemin, nous viendrons volontiers vous chercher à l’arrêt de bus le plus proche ou devant le bâtiment du colloque.Dans ce cas, veuillez nous contacter à l’adresse électronique suivante : ebgb@gs-edi.admin.ch.