La Cour européenne des droits de l’homme critique la pratique suisse en matière de taxe militaire.

(rtn.ch/ats)

Dans un arrêt de chambre rendu mardi, les juges de Strasbourg estiment que la pratique suisse viole l’article 14 (interdiction de la discrimination) de la Convention, en lien avec l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale). Outre la distinction artificielle entre différentes personnes déclarées inaptes, ils soulignent que celles-ci sont désavantagées par rapport aux objecteurs de conscience qui peuvent effectuer un service civil et éviter ainsi de payer la taxe d’exemption.

Opposition à la taxe

L’affaire concerne un Bernois né en 1983. En 2004, il a été déclaré inapte au service militaire pour des raisons de santé non spécifiées dans l’arrêt, et versé dans la protection civile (PC). En 2010, l’intéressé a été astreint à payer 254 francs 45 au titre de la taxe d’exemption de l’obligation de servir. Il s’est opposé à celle-ci car son inaptitude médicale l’empêchait de servir tant dans l’armée que dans le service civil.

En 2011, le recourant a été informé qu’il était affecté à la réserve de la PC et dispensé du cours d’initiation. Par la suite, il a appris qu’il ne devrait pas accomplir ce service. A fin 2013, il a été libéré définitivement de toute obligation et n’a donc pas servi dans la PC.

La Cour européenne des droits de l’homme (CourEDH) constate que la pratique suisse aboutit à une différence de traitement entre des personnes placées dans des situations analogues. En 2009 dans l’affaire Glor contre Suisse, elle était arrivée à une conclusion similaire et avait pris note de la volonté de la Suisse de rétablir une certaine égalité entre les personnes effectuant le service militaire ou civil et celles exemptées.

Pour Strasbourg, les distinctions opérées par la Suisse entre la présente affaire et celle de 2009 ne sont pas pertinentes. L’absence de volonté du requérant d’effectuer un service militaire n’est pas déterminante puisqu’il a été déclaré inapte pour des raisons médicales.

Ordonnance révisée

En outre, la possibilité de réduire la taxe d’exemption en se faisant affecter à la PC est jugée ‘purement théorique’ puisque l’intéressé a été incorporé d’emblée dans la réserve et n’a pas pu servir. Enfin, le montant modeste de la taxe n’est pas décisif, surtout que le requérant était étudiant à l’époque.

La Cour conclut qu’elle ne parvient pas à cerner, au vu des explications fournies par le gouvernement suisse et à défaut d’indication des motifs médicaux d’exemption, pourquoi le degré de handicap de l’intéressé a été apprécié différemment de celui examiné en 2009 qui concernait un diabète de type 1.

Dans l’arrêt Glor, les juges européens avaient estimé qu’au vu des buts de la taxe d’exemption, la différence opérée entre les personnes inaptes dispensées du paiement et celles astreintes était discriminatoire. Ils avaient jugé essentiel le fait que le recourant avait toujours affirmé qu’il était prêt à servir. La discrimination résidait dans le fait qu’il était soumis à la taxe alors que des personnes souffrant de handicap jugé plus grave ne l’étaient pas et qu’aucun service alternatif ne lui avait été proposé.

A la suite de cet arrêt, le Conseil fédéral a modifié l’ordonnance sur l’appréciation médicale de l’aptitude au service. Depuis le 1er janvier 2013, ce texte permet, à certaines conditions, d’être déclaré ‘apte au service militaire uniquement dans des fonctions particulières.’ À cet effet, la personne intéressée doit exprimer sa volonté par écrit et elle peut être incorporée comme ‘soldat d’exploitation’. (arrêt du 12 janvier 2020 dans la cause No 23040/13)

Hommage à Anne Tercier, militante hors norme des droits civiques

(Le Temps)

Anne Tercier s’est éteinte à 41 ans, le 30 décembre dernier à Lausanne. La mémoire collective se rappellera d’elle comme d’une militante des droits civiques qui a réussi à surpasser les difficultés de son handicap mental pour faire bouger des lignes dans notre société.


Anne Tercier prend la parole lors d’un Bla-Bla Vote en 2019, qui se tient à la maison de quartier de Chailly à Lausanne. — © Jules Brischoux

 

Omar Odermatt, coordinateur du Bla-Bla Vote pour Eben-Hézer Lausanne. Bruno Wägli, directeur adjoint, responsable du département socio-éducatif d’Eben-Hézer Lausanne.

Vivant depuis le 4 février 2002 au sein d’Eben-Hézer Lausanne (établissement socio-éducatif dépendant de la Fondation Eben-Hézer), Anne Tercier a toujours fait usage de son droit de vote, car comme elle l’affirmait «voter, c’est être reconnue comme une citoyenne à part entière du fait que ma voix compte autant que celle des autres». En 2018, sans explication, elle se voit soudainement privée de ses droits civiques. Débute alors pour elle un combat pour récupérer ses droits, mais également pour que toutes les personnes en situation de handicap puissent être reconnues dans l’exercice de ce droit, conformément à la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées, ratifiée par la Suisse en 2014.

«Pour que chaque voix compte»

Elle est appuyée dans sa démarche par plusieurs députés et trois interventions parlementaires sont déposées au Grand Conseil vaudois entre juillet 2019 et octobre 2020; dont une motion qui, suite à son examen en commission, sera traitée par le parlement.

Son combat a été raconté en septembre 2020 par Le Temps, tout comme son investissement au sein du mouvement Tous Citoyens d’Eben-Hézer Lausanne et du Bla-Bla Vote, un projet porté par la maison de quartier de Chailly et Eben-Hézer Lausanne.


Lire aussi son portrait: Le combat d’Anne Tercier, atteinte de déficience intellectuelle, pour récupérer ses droits civiques

Cet engagement civique lui a valu ensuite des invitations dans plusieurs autres médias nationaux, notamment à l’occasion de la votation cantonale genevoise du 29 novembre dernier qui a abouti à la reconnaissance du droit de vote à près de 1200 personnes jugées incapables de discernement. Le 30 novembre dernier, quelques minutes avant de rejoindre le plateau de l’émission Forum de la RTS, elle confiait: «Je suis très fière, car je suis allée au bout d’une chose que je n’aurais jamais pu imaginer il y a trois ans.»

Oui, Anne Tercier peut être très fière. Son combat politique a mis en lumière que dans le canton de Vaud, des personnes en situation de handicap sont privées de leurs droits civiques sans motif explicite, et ce, au mépris des engagements internationaux de notre pays. Son engagement devrait toutes et tous nous interroger sur la notion même d’incapacité, sur notre regard et la place que nous accordons aux personnes en situation de handicap dans notre société. Malgré son départ précipité, son combat «pour que chaque voix compte» se poursuit.

La HES-SO Valais et la FRH obtiennent 2 millions de francs pour stimuler l’innovation liée au handicap

(Le Nouvelliste)

La HES-SO Valais-Wallis et la Fondation pour la recherche en faveur des personnes en situation de handicap entendent booster la création de projets innovants dans ce domaine. Pour ce faire, elles s’appuieront d’ici à 2024 sur un financement fédéral de 2 millions de francs.
Par Florent Bagnoud


La HES-SO Valais-Wallis et la Fondation pour la recherche en faveur des personnes en situation de handicap entendent booster la création de projets innovants dans ce domaine. Héloïse Maret/Archives

 

Faire appel à l’innovation pour améliorer l’inclusion des personnes en situation de handicap. C’est l’objectif de la Fondation pour la recherche en faveur des personnes en situation de handicap (FRH) et de la HES-SO Valais-Wallis. Pour développer cette Mission les deux entités ont reçu en août un financement de 2 millions de francs de l’agence Innosuisse, dans le cadre de son programme de soutien national «NTN – Innovation Booster».

De nouvelles technologies à développer

Entre 2021 et 2024, elles utiliseront cette enveloppe pour stimuler l’éclosion de projets innovants en lien avec le handicap dans tout le pays. C’est le Living Lab Handicap, fondé en 2019 par la FRH et la HES-SO Valais-Wallis, qui pilotera ce NTN. Chaque année, 245 000 francs seront distribués via 37 chèques allant de 5000 ou 10 000 francs.

«Pour l’instant, tout est ouvert. Mais on peut imaginer que les projets que nous soutiendrons porteront sur l’accessibilité aux transports publics, le développement de nouvelles technologies pour les fauteuils roulants ou encore les adaptations dans le domicile de ces personnes», indique Noémie Moulin, coordinatrice du NTN au sein de la FRH. Le million de francs restant sera dédié aux frais de fonctionnement de ce «booster» d’innovations.

Expérimenter les besoins

Pour encourager l’émergence d’idées et créer une communauté d’innovateurs, la FRH peut compter sur le soutien de 34 partenaires – écoles, universités, entreprises ou institutions spécialisées – à travers le pays. Plusieurs événements seront mis sur pied dans des villes suisses. «Les participants qui souhaitent déposer une idée de projet peuvent être des entreprises, des étudiants et même des privés. L’idée est de créer des équipes pluridisciplinaires, composées notamment de personnes en situation de handicap», glisse Noémie Moulin.

Elle précise qu’une commission d’experts, composée en partie de personnes en situation de handicap, et une commission scientifique analyseront les demandes en vue de l’attribution des chèques.

«Donner une première impulsion»

Les premiers prototypes devraient être réalisés d’ici à la fin 2021. Le processus reprendra à zéro en 2022, pour d’autres équipes et d’autres projets en lien avec le handicap. Ainsi de suite jusqu’à fin 2024. «Notre soutien financier vise à donner une première impulsion. Une fois un projet lancé, l’idée est que les équipes trouvent par elles-mêmes les fonds nécessaires à sa poursuite», lance Benjamin Nanchen, manager du Living Lab Handicap.

La HES-SO Valais-Wallis est également impliquée dans deux autres NTN, portant sur l’énergie. Ceux-ci sont également soutenus à hauteur de 2 millions de francs chacun sur quatre ans.

Des masques transparents pour les enseignants (VD)

(20min.ch/ats)

Le canton de Vaud est passé aux masques transparents dans certaines de ses classes.

L’objectif consiste principalement à équiper les enseignants qui travaillent avec des élèves sourds et malentendants.

Au total, 6800 masques de ce type seront livrés d’ici la fin de la semaine aux quelque 1000 enseignants vaudois.

Le canton de Vaud souhaite ensuite élargir l’utilisation de ces masques à d’autres types d’enseignement: cours de français à des élèves allophones ou à des enfants aux besoins particuliers, comme dans les cas d’autisme.

Aux soins intensifs, le triage lié au handicap a été précisé

(24heures.ch/ats)

«L’échelle de fragilité», relative notamment à la démence, a été mise à jour, à la demande des associations œuvrant pour la défense des personnes en situation de handicap.


Photo d’illustration. L’unité des soins intensifs dédiée aux patients du Covid-19 au CHUV. KEYSTONE

 

L’Académie suisse des sciences médicales (ASSM) et la Société suisse de médecine intensive (SSMI) ont publié jeudi une version actualisée des directives pour le tri des patients Covid-19 en cas de pénurie des ressources dans les unités de soins intensifs. Elle précise notamment que «l’échelle de fragilité» ne peut être utilisée en relation avec les personnes handicapées.

Les recommandations concernant les prises de décision des professionnels aux unités de soins intensifs demeurent inchangées sur le fond, a indiqué l’ASSM dans un communiqué. Elles ont été précisées sur la base des expériences acquises depuis le début de la pandémie.

La nouvelle version 3.1 précise le principe du pronostic de survie à court terme, l’élément décisif pour le tri des patients. Par ailleurs, elle souligne l’importance du respect et de la réévaluation de la volonté du patient.

Dans la version antérieure, les explications concernant l’âge, le handicap et la démence en tant que critères non admissibles pour les décisions de triage étaient en partie trop concises et ont conduit à des malentendus, écrit l’ASSM. Ces passages ont été complétés ou reformulés.
Echelle contestée

Dans un communiqué, les organisations Inclusion Handicap et AGILE.CH se félicitent de cette décision. L’application de «l’échelle de fragilité» (« Clinical Frailty Scale ») aurait conduit à exclure les personnes handicapées des soins de médecine intensive à une fréquence supérieure à la moyenne. Cette échelle se réfère au degré de dépendance par rapport à l’aide de tiers pour les personnes dès 65 ans.

Inclusion Handicap et AGILE.CH avaient adressé un courrier à l’ASSM lui demandant de réviser ses critères de triage. Selon ces organisations faîtières, cette échelle n’est pas validée pour déterminer la fragilité des personnes en situation de handicap.

Les directives sur les mesures de soins intensifs, qui dataient de 2013, ont été actualisées le 20 mars 2020 lors de la première vague de Covid-19 avec une annexe portant sur les décisions de triage en cas de pénurie de ressources. Elles sont adaptées régulièrement en fonction des expériences issues de la pratique ou des nouvelles découvertes scientifiques.