(lematin.ch)
Un professeur de droit bâlois fait partie du comité désormais en charge du cas ultrasensible. Mais qu’est-ce que ce méconnu «CDPH»? Explications.
Le Comité international des droits des personnes handicapées se réunira à Genève pour étudier le dossier de Vincent Lambert. Image: AFP
L’interminable et douloureuse affaire Vincent Lambert, dans un état végétatif depuis dix ans, semblait toucher à sa fin. Mais coup de théâtre lundi soir: la Cour d’appel de Paris a décidé qu’il fallait reprendre les soins qui maintiennent le Français de 42 ans en vie. Et ce jusqu’à ce que le Comité international des droits des personnes handicapées (CDPH) se prononce. Voilà donc un nouvel acteur qui entre en jeu. Mais qu’est-ce que ce CDPH? Et quel est son pouvoir? On fait le point.
Qu’est-ce que ce comité?
Le Comité international des droits des personnes handicapées relève du Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU. Il s’agit d’un collège qui surveille la bonne application de la Convention des droits des personnes handicapées par les États qui l’ont ratifiée – presque tous les pays de la planète.
Qui le compose?
18 experts indépendants qui se réunissent normalement deux fois par années pour des sessions qui se tiennent à Genève. La prochaine est agendée du 26 août au 20 septembre. Ces experts doivent être des «personnalités d’une haute autorité morale et justifiant d’une compétence et d’une expérience reconnues dans le domaine» du handicap. Pour la première fois, depuis début 2019, ce comité comprend un Suisse, le professeur de droit de l’Université de Bâle Markus Schefer, 54 ans. C’est un «expert reconnu en matière de droits humains et de droits fondamentaux, également spécialisé dans les questions liées aux droits des personnes handicapées», selon les termes de la Confédération.
Que vient faire ce comité dans l’affaire?
Ce sont les parents de Vincent Lambert, farouchement opposés à l’arrêt des soins, qui ont saisi en urgence le comité le 24 avril dernier. Le 3 mai, le CDPH a demandé à la France de «prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que l’alimentation et l’hydratation» du Français tétraplégique «ne soient pas suspendues pendant le traitement de son dossier par le comité». En clair le comité ne s’est pas exprimé sur le fond. Mais il a demandé des mesures provisoires pour pouvoir le faire. Et la Cour d’appel de Paris a suivi.
Ses directives sont-elles contraignantes?
Non, les États n’ont aucune obligation de suivre les directives du CDPH, qui émet des avis «non-obligatoires». C’est le cas aujourd’hui, ce sera le cas lorsque le Comité tranchera sur le cas de Vincent Lambert. Reste que ses avis ont du poids, comme on vient de le voir. Car pourquoi un état ratifierait-il une convention pour ensuite ne pas tenir compte de ceux qui veillent à son application? «Les États font en général preuve de bonne volonté. Sinon, ils saperaient toute autorité du comité», a résumé la spécialiste en droit international des droits de l’homme Sophie Grosbon dans «Ouest-France».
Quand le comité va-t-il trancher?
Markus Schefer s’est exprimé sur ce point. Et son éclaircissement a dû désespérer l’épouse de Vincent Lambert, qui se bat depuis six ans pour l’arrêt de l’«acharnement thérapeutique». Sur le fond d’une affaire, les décisions se prennent «habituellement dans les trois à quatre ans suivant la demande initiale», a indiqué l’expert suisse à l’AFP… Apparemment il n’y a qu’une issue qui puisse accélérer les choses: ce serait si le CDPH se déclarait incompétent.