Six choses à savoir pour mieux vivre l’autisme

(La Côte)


TSA Vivre avec un enfant autiste exige des ajustements permanents et la volonté de se battre pour lui offrir le meilleur des thérapies efficaces. Des solutions existent dans la région.

 

PAR ANNE.DEVAUX@LACOTE.CH

De mieux en mieux diagnostiqués, les troubles du spectre autistique (TSA) sont difficilement pris en charge à la hauteur des besoins thérapeutiques des très jeunes enfants dépistés précocement. Sachant que la prévalence de l’autisme est d’une naissance sur cent, ce qui n’est pas pris en charge aujourd’hui sera d’autant plus lourd et cher à porter dans les prochaines années. Les TSA regroupent le syndrome autistique, le syndrome Asperger ainsi que des troubles envahissants non identifiés.Dans les grandes lignes, l’autisme perturbe sévèrement la communication et les interactions sociales, mais derrière cette définition large, chaque cas est singulier, plus ou moins sévère et autonome.

1) LA FICTION ET LA RÉALITÉ
«Le syndrome Asperger mis en scène par les séries télévisées à travers des héros géniaux est très divertissant, mais la réalité n’est pas glamour à rapporter dans les médias», confie Yves Crausaz, président de l’association Autisme Suisse romande, papa d’un fils autiste âgé de 20 ans. Bénédicte Eissa, maman d’une enfant autiste, présidente de l’association OVA autisme à Gland, enfonce le clou: «L’autisme est un trouble envahissant du développement et envahissant pour les proches aussi. On peut constater des dommages collatéraux importants dans les familles concernées tant la charge émotionnelle, financière et logistique est énergivore et chronophage.» L’un et l’autre recommandent donc de ne jamais porter l’autisme de son enfant sans se faire aider.

2) UN DIAGNOSTIC PRÉCOCE
Le canton de Vaud s’est doté d’un pôle d’excellence en la matière: le Centre cantonal autisme au Centre hospitalier universitaire vaudois (Chuv) qui a ouvert en septembre 2015, sous la direction de Nadia Chabane, pédopsychiatre et professeure. Un premier axe a été rapidement mis en place avec succès: la formation des pédiatres qui sont en première ligne pour détecter précocement les cas possibles avec des outils spécifiques. Les pédiatres envoient ensuite les enfants au CCA pour un bilan complet et un diagnostic fonctionnel très affiné. «Aujourd’hui, on peut diagnostiquer un enfant de 18 mois, avant cet âge-là, il faut rester très prudent, précise Nadia Chabane, bluffée par la qualité du diagnostic des pédiatres qui envoient les enfants au Centre. Une antenne du CCA pour l’ouest du canton ouvrira en septembre. Elle sera hébergée dans les locaux de la consultation ambulatoire du Service de psychiatrie pour enfants et adolescents du Chuv, à Nyon.

3) LA PRISE EN CHARGE
C’est là que le bât commence à blesser. Yves Crausaz dénonce la situation actuelle: «Les enfants sont diagnostiqués beaucoup plus vite et mieux,mais derrière, il y a peu de choses, voire rien: un service éducatif itinérant d’une à deux heures par semaine qui ne correspond aucunement aux besoins de l’enfant.» Nadia Chabane œuvre pour mettre à profit les plus jeunes années de l’enfant en développant des structures d’intervention précoce intensive, soit 20 heures par semaine, ainsi que des groupes de socialisation, mais elle admet que pour le moment, peu d’enfants y ont accès. «Avec un enfant diagnostiqué à 24 mois, nous avons deux ans pour modifier considérablement son parcours de développement»,précise-t-elle, c’est-à-dire deux ans pour changer son avenir avec pour objectif la scolarisation.

4) LA FORMATION DES PARENTS
Les enfants atteints de TSA exigent un travail énorme pour infléchir le développement du handicap. Cela signifie que les parents doivent être quasi-ment aussi bien formés que des professionnels pour prendre le relais des thérapies comportementales à la maison. Les formations sont délivrées, entre autres, aussi bien au CCA, qu’à Gland par l’association OVA que par Autisme Suisse romande à Lausanne. Sarah Tille, maman de Sacha, jeune autiste âgé de 10 ans, à Grens, confirme l’importance de bénéficier des formations et d’un suivi: «Nous sommes coachés par une thérapeute qui s’occupe de Sacha en séance individuelle et qui répond à toutes nos questions. Dès que je vois Sacha mettre en place un nouveau toc, je le désinstalle, il n’y a rien d’intuitif, il ne faut rien lâcher même pendant une journée.» Aussi bien chez les Tille que chez les Crausaz,le mot d’ordre est de continuer à vivre et de ne passe priver d’activités familiales, de sorties ou même de voyages. Mais tout se prépare avec patience.

5) LES AIDES FINANCIÈRES
Les thérapies comportementales intensives bénéficient d’une efficacité empirique très large et font partie des recommandations inter-nationales, mais ne sont pas financièrement prises en charge en Suisse. Les parents doivent trouver des fonds privés. Yves Crausaz insiste: «Une prise en charge précoce et intensive coûte entre 80 000 et 100 000 francs par an,mais 50% des enfants qui en bénéficient peuvent intégrer une scolarité normale.» Pour se faire accompagner, les parents ne doivent pas hésiter à se rapprocher des associations et des fédérations qui viennent en aide aux personnes handicapées, tous handicaps confondus, telles que Procap, qui a par exemple aidé la famille Tille pour le dossier de Sacha. Elles sont armées pour monter des dossiers auprès de l’Assurance Invalidité,mais également de toutes les structures susceptibles de participer au financement des thérapies précoces. L’association OVA propose des solutions de financement de la prise en charge par des sponsors privés. «Nous avons une personne qui passe son temps à faire du fundraising pour cela», précise Bénédicte Eissa.

6) LES PRINCIPALES STRUCTURES
Domicilié dans la région de Rolle,Yves Crausaz connaît bien les structures de La Côte. Son fils, tout comme le jeune Sacha Tille, est passé par l’association OVA à Gland. Spécialisée dans la thérapie A.B.A (analyse appliquée du com-portement), elle dispose d’un centre pour les enfants dès l’âge de deux ans et intervient également à domicile. La Fondation de Vernand scolarise les enfants dans des classes d’enseignement spécialisé qui font partie du dispositif scolaire et dont les prestations sont gratuites. Elle accueille les élèves à Nyon à l’Ecole pour enfants atteints d’autisme et dans deux classes au sein des collèges du Cossy et Marens, ainsi qu’à Morges au collège du Petit-Dézaley. Une nouvelle classe ouvre aussi à Cossonay à l’Ecole des Condémines. De plus,grâce à des dons, elle a développé des groupes de développement des compétences sociales pour les adolescents autistes. L’école de la Passerelle, à Lavigny, intègre tout type d’enfants ayant des difficultés scolaires importantes. La FEDEA School (Fondation pour l’éducation des enfants autistes), à Morges est bilingue. Toutes ces structures souffrent du même problème: le nombre de places limité.