Il annule leur réservation parce qu’ils ont un handicap mental

(20min.ch)

En apprenant que ses futurs clients sont handicapés mentaux, le patron d’une auberge de Laax (GR) a retiré son offre. Contacté, il assure que sa démarche est tout sauf discriminante.

par Daniel Krähenbühl/ofu

Une semaine de vacances à Laax (GR), une station idyllique nichée entre les montagnes et les lacs. C’est ce qu’a voulu offrir la fondation «Freier leben» à douze jeunes souffrant de troubles d’apprentissage et d’un léger handicap mental. Pour cela, elle a réservé plusieurs chambres dans une auberge de la localité grisonne. Selon l’échange de mails entre le patron et la fondation, que «20 Minuten» a pu se procurer, tout s’est déroulé normalement au début. Le gérant a expliqué que les chambres étaient libres et la fondation s’est dite prête à vouloir verser un acompte pour la réservation. Or soudainement, le patron de l’auberge a fait marche arrière.

«Désolé, mais je viens de réaliser que les clients sont des personnes souffrant d’un handicap mental. Je suis navré de devoir vous dire que nous ne sommes pas adaptés pour les héberger», peut-on lire dans le mail. Dans l’écrit, le responsable de l’auberge assure qu’il «ne s’agit pas de discrimination». «Nous sommes restés plusieurs fois avec des frais impayés par le passé. Nous ne pouvons pas nous le permettre vu la situation actuelle.»

Handicap mental et non physique

Selon Nuria Frei, avocate auprès de l’association Inclusion Handicap, le comportement de l’auberge est «clairement discriminant et viole la loi sur l’égalité pour les handicapés». Et d’ajouter: «Il ne semble pas s’être rendu compte que des personnes souffrant d’un handicap mental ne nécessitent pas une infrastructure particulière. Il aurait dû se renseigner davantage au lieu d’annuler immédiatement la réservation.» Susanne Stahel, en charge de la communication pour Pro Infirmis, est du même avis. «Nous ne connaissons pas le cas concret, mais si des personnes handicapées ont été exclues consciemment alors il s’agit d’un scandale.»

Contacté, le responsable de l’auberge se défend: «Nous ne discriminons personne, peu importe son origine, sa couleur de peau ou sa constitution physique.» Au contraire: «Nous gérons un établissement international et nos clients viennent de partout dans le monde.» Selon lui, la réservation a été annulée parce que l’auberge ne pouvait pas assurer un hébergement adapté pour les clients en question: «Notre auberge n’a pas été construite pour accueillir les personnes handicapées.» Selon le gérant, l’établissement a 120 ans et s’étend sur trois étages sans ascenseur. Selon lui, ni les chambres ni les installations sanitaires ne conviennent aux personnes handicapées. En revanche, il ne s’exprime pas sur le fait qu’il s’agit ici de personnes souffrant d’un handicap mental et non physique.

«Nous nous en excusons»

Le patron explique par ailleurs avoir perdu beaucoup d’argent par le passé parce que des gens ont effectué des réservations avant de les annuler au dernier moment en réalisant que l’établissement n’était pas adapté. Il tient tout de même à s’excuser: «Si nous avons tiré de fausses conclusions quant à l’hébergement des clients en question, nous nous en excusons. Ce n’était pas notre intention. À aucun moment, nous voulions discriminer quelqu’un.» Pour finir, il aurait souhaité que la fondation ait visité les lieux avant d’effectuer la réservation afin de les aviser de la condition particulière des clients. «Cela aurait permis de tout régler sur place. Si nous avions alors décidé que tout était en ordre, alors ils auraient bien évidemment pu loger chez nous.»